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Auteur Sujet: Le lien organique entre délire et pouvoir.  (Lu 14076 fois)

Jacques

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Le lien organique entre délire et pouvoir.
« le: août 10, 2007, 02:57:59 »
Typologie des croyants à un délire collectif.

Dans l'échelle sociale des croyants, on distingue quatre marches, plus des subdivisions :

1 - Les crédules naïfs, et leur évolution possible en crédules paresseux.
J'appartenais à cette catégorie quand j'avais quatre ans : le p'tit Jésus, le Père Noël, le dieu qui a créé tous les zècres, je gobais tout, à cet âge-là.
A cet âge-là, non seulement on n'a pas encore été confrontés aux preuves du caractère contrafactuel des croyances reçues, mais surtout on n'a pas encore l'équipement neurologique pour découdre un tissu de mensonges, quand vos propres parents sont vêtus de ce tissu de mensonges. C'est très pressé d'apprendre, un enfant, et ça fera le tri bien plus tard. Apprendre le maximum pour la survie immédiate, en précaution d'orphelinat précoce, telle fut une contrainte sélective sévère.

On me suggère d'ajouter la subdivision des crédules paresseux, style : "Mon père était catholique, mon grand-père était catholique, donc je suis catholique, et si ça fonctionnait pour eux, cela va fonctionner pour moi." Michel de Montaigne s'expliquait de même par cette phrase à l'ambiguïté totale : "Je suis catholique au même titre que périgourdin".
Cette loyauté automatique à sa famille d'origine et aux croyances de sa famille d'origine, ne tient la route que dans la stricte mesure où l'on n'a pas été maltraité par ceux-là. Bien sûr, quand cette famille d'origine maltraitait, ou faisait maltraiter par ses exécuteurs des basses oeuvres, les devoirs de loyauté transgénérationnelle sont violés dès l'origine, et nous voilà délivrés de tout devoir de fidélité envers leurs croyances d'imposteurs et tortionnaires.


2 - Les dévots.
avec deux sous-degrés (et tous les intergrades possibles) :
* Les dévots naïfs mais adultes, voire âgés, mais encore non despotiques.
A 81 ans, et mourant d'un cancer, André T. appartenait encore et toujours à cette catégorie, et se cachait la tête dans le sable. Il prêchait pour que moi aussi je me cachasse la tête dans le sable, et son prêche pour l'aveuglement fit le plus grand profit des tueuses conjurées. Promis, je ne publierai les délires d'André qu'après la disparition de sa veuve.
Plus généralement, ils souffrent tous de graves lacunes à leur entendement, par entraînement aux dénis de réalité quotidiens. Faire le fou un jour ça va, tous les jours, bonjour les dégâts. Réciproquement, nous avons des raison de conjecturer qu'ils sont dévots justement parce qu'ils ont un besoin personnel à dénier des réalités, et à avoir un catalogue de faux-raisonnements tout préfabriqués, et que le délire externe prêt-à-porter remplit justement cette fonction d'aide au déni de réalité. A leur âge, ils ont été confrontés à des preuves du caractère délirant de leurs croyances, mais ils n'en ont jamais tenu compte.

* Les dévots despotiques.
Adhérer à un délire existant, qui leur semble puissant ou victorieux, ou prochainement victorieux, leur permet d'exercer leur despotisme sur leurs prochains.
Exemple comique : la vieille mère bigote et tyrannique dans le film "Whisky à gogo". Seul le whisky échoué sur l'île parvient à mettre fin à sa totale hostilité au mariage de son fils...
Le ouebmestre de forum.sceptiques.qc.ca en donne aussi un exemple démonstratif à http://forum.sceptiques.qc.ca/viewtopic.php?f=20&t=4189. Suite, messages de censure systématique.
En quoi diffèrent-ils des précédents ? Leur narcissisme est bien plus insécure et excité. Leur vanité dépasse de si loin leurs compétences réelles, qu'ils ont constamment peur que leurs impostures éclatent au grand jour. D'où leur impatience à tout contrôler de vous, à exercer le contrôle total sur la relation, et sur vos représentations.


3 - Les manipulateurs cyniques.
Non, ils n'y croient pas vraiment, aux crédulités qu'ils exigent des autres, mais ils font mine d'adhérer à un délire prêt à porter, pour accentuer leur emprise sur le petit peuple. Ce sont des pervers accomplis.
Le shah Mohammed Reza Pahlavi en était un exemple (l'exemple est controversé par au moins un iranien : selon lui, seul son père était incroyant). Napoléon Bonaparte aussi. L'armée algérienne et le FLN aussi, qui ont appuyé le sectarisme et l'intégrisme musulman, pour mieux abêtir et déculturer les masses populaires à exploiter.
Jacasse, Reine-Mère fuie de tous, en donnait un autre exemple vers 1969, quand elle se plaignait que sa fille "n'ait pas reçu d'éducation religieuse. Si Florence avait reçu une éducation religieuse, elle me respecterait et m'obéirait". Autres exemples des techniques manipulatoires de la Reine-Mère à http://jacques.lavau.perso.sfr.fr/Fam_Lavau/Delire_borderline_Reine-Mere.html et à Les guignols de la malveillance.
Le livre de Sandor Kopácsi, Au nom de la classe ouvrière, donne plusieurs exemples saisissants de ces manipulations cyniques de dogmes négateurs de réalité. Numérisations partielles à http://deonto-famille.org/citoyens/debattre/index.php?topic=322.0. Extrait du 23 octobre 1956 :
Citer
A la grande surprise de tout le monde, le « nouveau camarade conseiller soviétique » se leva sans même demander la parole. D'un geste bien caractéristique de la main, il écarta du front ses cheveux rebelles, fit signe à son interprète et se mit à parler en martelant chaque syllabe.
-   Les fascistes et les impérialistes font descendre dans la rue de Budapest leurs troupes de choc, et il y a encore des camarades des forces armées de votre pays qui hésitent à employer des armes !
L'interprète traduisit, et nous écoutâmes bouche bée. Nous eûmes droit aux capitalistes déguisés : en étudiants, aux représentants des propriétaires terriens qui fourbissent leurs armes dans les rues, et à la nécessité « d'une leçon à donner à la pègre fasciste ». Toute la phraséologie agressive et éculée de la Pravda, tout le clairon stalinien de la guerre froide datant de trois ans. En catimini, les vice-ministres échangèrent des regards. Non, en Hongrie, en 1956, ce style n'était plus de mise. Ces grands officiers de la Sécurité hongroise n'étaient assurément pas des démocrates : ils croyaient dur comme fer à la nécessité d'employer la force le cas échéant. Mais le sabir d'autrefois les dérangeait. Ils m'adressaient des signes d'encouragement pour que je réponde à cet inconnu.
-   Vous permettez, camarade ministre ? Un mot seulement. Visiblement le camarade conseiller venant de Moscou n'a pas eu le temps de s'informer de la situation de notre pays. Il faudrait que nous lui disions : ce ne sont pas les « fascistes » et autres « impérialistes » qui projettent la manifestation, ce sont les universitaires, fils et filles de paysans et d'ouvriers triés sur le volet, la fine fleur de l'intelligentsia de notre pays qui réclame ses droits et veut manifester sa sympathie pour les Polonais.
Rouge comme une tomate, le petit civil parla tout bas avec le ministre. Il s'était fait traduire mes propos ; il piquait une colère.
Les vice-ministres prirent la parole, l'un après l'autre, et demandèrent à tour de rôle au ministre de se décharger de la responsabilité de l'interdiction au profit des instances supérieures du parti.
-   Bien.
Le ministre décrocha le « téléphone rouge » une seconde plus tard, il eut en ligne le camarade Gero à qui il fit part brièvement de mon avis.
Le premier secrétaire du parti pria le ministre de patienter sans raccrocher.
Nous gardâmes le silence. L'inconnu en civil me fixa longuement, puis il se pencha sur son bloc, gribouilla quelques lignes sur le papier.
Brusquement, nous entendîmes le coassement de Gero au téléphone. L'expression du ministre changea, la tension céda la place au soulagement et à l'obséquiosité.
-   Oui, camarade Gero, d'accord camarade Gero, vos ordres seront exécutés, camarade Gero.
La décision du bureau politique était de lever l'interdiction. La nouvelle fut aussitôt annoncée à la radio. Les vice-ministres et moi-même fûmes priés de nous rendre personnellement dans les différentes facultés pour faire part aux étudiants de la décision et leur rappeler de veiller au bon déroulement des choses.
Le nouveau conseiller soviétique se leva, me jeta un dernier regard chargé de hargne puis se détourna. Nous quittâmes précipitamment la salle des conférences : l'heure prévue pour le cortège approchait.

...
Fin de citation.
Ce  "nouveau camarade conseiller soviétique en civil", était le général Sérov, qui ensuite veilla personnellement à l'incarcération de tout ce qui résistait à la réinvasion par l'armée russe, et aux exécutions. Le rôle de Youri Andropov, alors ambassadeur d'URSS dans la colonie hongroise, est également très détaillé par Kopácsi : élégant danseur galant, puis maître de tortures, dans la même ambassade, mais pas au même étage. Tels sont les cyniques manipulateurs, exploiteurs de croyances prêtes-à-croire. Ici exploiteurs de la croyance en le rôle rédempteur et d'avant-garde la classe ouvrière, ailleurs de la paysannerie (Pol Pot), ailleurs encore de l'Islam, ailleurs encore du catholicisme, ailleurs encore du mythe de l'image de la femme, etc. etc...


4- Les gourous.
Ceux-là créent un délire qu'ils exportent sur les crédules, au service des besoins du gourou, ne pouvant se satisfaire des délires déjà présents sur le marché.
Muhammad, de la tribu de Qoraish, est un exemple célèbre, et assez bien documenté.
Jim Jones, gourou de la secte au Guyana, qu'il a suicidée au cyanure et aux armes à feu, en est un autre exemple type.

Une secte est un imposteur collectif, qui est en train de réussir à donner la force du nombre à ses mensonges et ses délires. Une religion (et certaines idéologies d'état), est une secte qui a réussi, qui dispose de grands biens immobiliers, de banques, de tribunaux d'église, de prisons d'église, voire d'armées, etc.

Entre une secte et un pervers narcissique manipulateur (PNM pour les intimes), seul le nombre diffère. Mêmes recettes pour envahir l'autre et tâcher de le rendre fou, même mépris total de l'autre, même égocentrisme total, mais habillé de ruses pour capturer l'autre, même prédation, même exploitation cherchant à aboutir à l'esclavage parfait et aux meurtres parfaits.
Critères diagnostiques de la relation tyrannique, perverse et sectaire : D'abord l'interdiction totale des métacommunications, afin de verrouiller les doubles contraintes et les contradictions insolubles. Ensuite ces doubles contraintes afin de pouvoir simultanément reprocher tout et son contraire, imposer tout et son contraire, le divorce entre le dit et le fait, la contrainte à accepter de continuelles contre-vérités...



Le lien organique entre délire et pouvoir.
Pour aller au fond des choses, il faut détailler le lien organique entre le pouvoir et le délire.
Montesquieu avait bien proposé un mécanisme, qui s'appliquait à merveille à son roi Louis XV, sous le masque de l'allusion à l'empire ottoman : "Plus l'empire est étendu, et plus grand est le harem, et plus le prince est ényvré de plaisirs. En sorte que plus l'empire est étendu, et moins on y débat des affaires de l'empire."

En fait, cela se constate dès les plus incarcérés des schizophrènes, apparemment les plus dépourvus de pouvoirs : le délire est un moyen de reprendre le pouvoir sur son prochain. Avec sa finesse d'écrivain humoriste, Jay Haley avait parfaitement pointé ce fait dans son livre "Tacticiens du pouvoir, Jésus-Christ, le psychanalyste, le schizophrène et quelques autres". Certains se précipitent déjà pour circonscrire les dégâts produits par cet incrédule de Haley : "Oui, mais seulement dans son chapitre VI, L'art d'être schizophrène !" (traduction chez ESF, 1984). Non... Dans tous les chapitres.
Et de plus, Haley avait pointé le fait déjà dans la famille schizophrènogène, et poursuivi en analysant la structure de pouvoir et de mensonge de l'hôpital psychiatrique : "... une sorte de tristesse vague et bizarre, qui cache, sous le vernis de l'espérance et des bonnes intentions, une lutte à mort pour le pouvoir, teintée d'une note permanente d'ambigüité."

Le pouvoir permet d'échapper à toute obligation de résipiscence, à tout retour les pieds sur Terre.
Une cour flatteuse, et/ou craintive, aide à se couper des réalités externes. Ainsi Saddam Hussein était-il tellement puissant sur sa cour, que l'administration Bush n'a eu aucune difficulté à le berner, à lui faire croire, notamment via leur ambassadrice April Glaspie, qu'ils le laisseraient envahir le Koweit sans réagir. Et il les a crus, cet ahuri !
Citer
   * The entrapment paradigm was not theory but fact. From July 19 until August 2 of 1990, the United States quietly allowed Iraq to build up its forces in preparation for the invasion and never warned Iraq that it would respond militarily should it invade Kuwait. The paradigm acquires irrefutable certainty consequent to the meeting between President Saddam Hussein and April Glaspie, then U.S. ambassador to Iraq, on July 25, 1990, only seven days before the invasion (read transcript.)
    * In that meeting, Glaspie unequivocally told the Iraqi president, “We [the United States] have no opinion on your Arab - Arab conflicts, such as your dispute with Kuwait. Secretary [of State James] Baker has directed me to emphasize the instruction, first given to Iraq in the 1960s, that the Kuwait issue is not associated with America.” [Italics added]. Having received that assurance, Iraq invaded Kuwait.
Dossier rassemblé à http://deonto-famille.org/citoyens/debattre/index.php?topic=398.0.




Article encore en cours de rédaction, affaire à suivre.
« Modifié: mai 18, 2010, 01:19:09 par Jacques »
La science se distingue des autres modes de transmission des connaissances, par une croyance de base : nous croyons que les experts sont faillibles, que les connaissances transmises peuvent contenir toutes sortes de fables et d’erreurs, et qu’il faut prendre la peine de vérifier, par des expériences

Jacques

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Esprit critique, et sortie d'un délire collectif ?
« Réponse #1 le: octobre 28, 2010, 11:00:16 »
Les conditions de sortie d'un délire collectif ?
Peut-on mesurer l'esprit critique ?


Citer
    ... A mon sens le manque d'esprit critique ne devient manifeste que lorsque l'on n'est plus capable de faire la différence entre ce qui est dans la catégorie des faits scientifiques et dans ce qui est de la catégorie de la croyance.

Petit oubli : la dimension sociale.
L'homme est un animal social. Il en découle que les croyances et délires collectifs ont beaucoup plus d'importance que les croyances et délires individuels, idiosyncrasiques.

Exemple 1 :
Dans un colloque de psychanalystes : "Si l'instinct maternel, Oups ! Je veux dire l'envie du pénis...".

Exemple 2 :
Dans n'importe quel cours ou manuel de quantique : "Voici la solution de l'équation de Schrödinger, Oups ! Je veux dire la probabilité d'apparition du corpuscule farfadique et néo-newtonien !".

Vu les représailles que la communauté sectaire ne manquerait pas d'infliger à l'hérétique, il est beaucoup plus prudent de manifester très fort son attachement aux délires collectifs, tant que c'est eux qui détiennent le flingue.

Deux exemples encore ?
Un sujet de Bac Pro dictait à nos élèves de croire la relation de Bernoulli applicable là où elle serait totalement invalide : il s'agissait de conduites hydrauliques à haute pression, pour engin de travaux publics, "La conduite se rompt. Calculer la vitesse d'éjection de l'huile à l'instant de la rupture". Exercer votre esprit critique ? Vous n'y songez pas, malheureux ! C'est l'inspecteur qui a le flingue !

Un livre de maths pour B.E.P. se dispensait de toute épreuve de réalité expérimentale, et enseignait la confusion entre dynamique et cinématique :
"Le courant pousse comme cela, à tant de newtons, le moteur pousse comme cela, à tant de newtons, calculer le point d'arrivée du bateau sur l'autre berge."
Bon alors voilà, si l'on prétend "Le moteur exerce une poussée de tant de newtons dans telle direction", c'est qu'on sait à quoi on accroche le dynamomètre, et comment on procède à la mesure.
Si l'on prétend "Le courant pousse comme cela, à tant de newtons ", c'est qu'on sait à quoi on accroche le dynamomètre, et comment on procède à la mesure. On l'accroche à un autre bateau dans le même courant, ou à la berge ? Si on l'accroche à la berge, on procède comment pour la mise en attitude du bateau sujet à mesure ? Nez au courant ? Ou orienté comme durant le "bac" (la traversée de rivière) décrit dans l'énoncé ? Tiens c'est curieux, quand on tente de procéder ainsi, le bateau chavire aussitôt, si le courant est assez fort...
Mais qu'on se rassure, un tel livre est rédigé "sous parrainage d'inspecteurs de l'Education Nationale" qui ne peuvent ni se tromper ni nous tromper. Voie hiérarchique oblige...

En tant que cliniciens, on pourrait s'intéresser aux voies d'apparition de l'esprit critique, et aux voies de disparition de l'esprit critique. Synonyme pratique : l'indépendance d'esprit.

Mais c'est un très gros sujet.


Peut-on mesurer les représailles contre l'esprit critique ?

Mon expérience m'inciterait à répondre que oui.

Une solution par exemple, serait de lister les flots d'insultes et de menaces qui sont adressées à l'esprit critique. J'en ai dressé quelques listes.
La science se distingue des autres modes de transmission des connaissances, par une croyance de base : nous croyons que les experts sont faillibles, que les connaissances transmises peuvent contenir toutes sortes de fables et d’erreurs, et qu’il faut prendre la peine de vérifier, par des expériences

Jacques

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Esprit critique ? Ou esprit DE critique ?
« Réponse #2 le: octobre 28, 2010, 11:30:21 »
Un énorme oubli chez ceux dont la raison sociale est de se faire passer pour "sceptiques" ou "zététiques", tout en demeurant groupuscules sectaires, aux pratiques totalitaires : la dimension sociale et communautariste.
On critique ce qu'on déteste, et qu'on ne craint guère.
On ne critique pas ce qu'on aime, ni ce qu'on redoute jusqu'à la terreur.
On critique ce qui est en dehors du groupe sectaire, afin de renforcer les frontières et l'illusion de supériorité de son groupe sectaire.

Sous Mao, durant la révolution culturelle, le mot d'ordre était "Pi Lin ! Pi Kong", soit : Critiquez Lin Piao, critiquez Koung Fou Tseu ! Et oser critiquer un tel mot d'ordre vous valait immédiatement quatre ans de rééducation en déportation dans une campagne reculée.

Bin wi, qui au juste a le pouvoir de faire la liste de ce qu'on a le droit de critiquer ?

De nos jours, l'affaire est entendue, la phrénologie est une fausse science.
Wi wi, mais durant 70 ans, jusqu'en 1938, l'université française a délivré un diplôme de 3e cycle de phrénologie. Oh payant, cher, hors-cursus universitaire normal : il était destiné à diplômer des experts judiciaires. Vous savez, ceux qui moyennant confortable rétribution, ont l'habileté de confirmer le juge qui les aime, dans son intime conviction préalable que le prévenu qu'il n'aime pas, a bien les sourcils broussailleux, le front bas, les bras courts du criminel-né, et qu'en conséquence de cette expertise hautement scientifique (aux dépens des contribuables ou du pré-condamné, n'oublions pas), le juge-qui-aime-bien-son-expert peut condamner lourdement le prévenu-qu'il-n'aime-pas, sans risques pour sa carrière.

On a quelques sérieux problèmes avec l'épistémologie et les fondements, en sciences humaines.

Mais en sciences dures aussi, nous avons de larges domaines qui ne sont encore jamais devenus scientifiques, qui sont demeurés du droit coutumier et routinier, sans épreuves de réalité, sans critères de scientificité, sans obligations contractuelles, sans déminage.

En sciences dures aussi, il reste localement d'énormes problèmes d'épistémologie. Et Humpty-Dumpty persiste à avoir le mot de la fin : "La question, c'est de savoir qui sera le maître. Un point c'est tout."


Dans un groupuscule sectaire dont la raison sociale est "Nous les vraies sciences contre eux les pseudo-sciences", ptranouez écrit:
Citation de: ptranouez
... l'esprit critique c'est être "capable de remettre en cause"

Enfin, s'il est facile d'être d'accord avec ta deuxième phrase, j'identifie mal son rapport avec le fil (Esprit Critique -> ? <- ? Pseudo-Sciences).

Pas idiot, mais mal formulé : il ne suffit pas d'avoir envie de critiquer, encore faut-il avoir le pouvoir de le faire.

Une des meilleures précautions d'Eric Berne ("Games people play", "What do you say after you say Hello ?") quand il animait des groupes psychothérapeutiques, était de leur faire cartographier les pouvoirs autour du groupe, d'où le croquis de ce qu'on peut y faire qui ne mette pas le groupe thérapeutique en danger de fermeture et d'interdiction, parce que quelque chose aura déplu à l'un des pouvoirs alentours. Et un des prérequis à ce métier, est d'avoir le pouvoir d'autoriser et d'aider efficacement quelqu'un à changer, à changer ses relations avec son passé et avec son entourage. Malgré certaines oppositions à toute guérison, des plus féroces et des plus violentes, de la part du dit entourage.

Pour l'indépendance d'esprit, telle que j'ai vu mes enfants la perdre dramatiquement, on l'apprend d'autrui, paradoxalement, et on demande à autrui l'appui et la protection nécessaire pour se la construire. Trop nombreux sont les gens qui ne l'ont jamais, jamais connue.


Jardinage de l'esprit critique ?
L'esprit critique ne tombe guère du ciel, il faut le transmettre, l'enseigner, en montrer les pouvoirs et les limites.
Et il peut se perdre. Là encore, j'ai des exemples tragiques à citer. Par la drogue, ou par la terreur, par la sénilité...

L'esprit critique, notamment l'humour critique, donne juste assez d'air pour respirer, mais ne donne pas les pouvoirs ni la méthode pour reconstruire à l'endroit.
Un ingénieur qui ne serait capable que de critiquer, serait un bien mauvais ingénieur. Son métier est de construire une bonne ou une meilleure usine, une meilleure machine, de meilleures méthodes, de meilleures relations avec les fournisseurs, les clients, les salariés, les élus locaux, etc. Il faut s'habituer à construire sereinement ce pouvoir. Là est le meilleur rempart social contre les nouveaux assauts des imposteurs et des croyances en pseudo qu'ils tentent de fourguer aux plus fragiles.

Un ingénieur ou psychothérapeute s'intéressent aux remèdes, pas à stigmatiser son prochain, à réhabiliter et non à exclure. Voilà le gouffre moral qui nous sépare.

Un outil de base a été élaboré depuis longtemps pour cela : l'examen en réflexivité.
http://jacques.lavau.perso.sfr.fr/Reflexivite.html
C'est le degré de réflexivité qui fait toute la différence entre l'esprit critique et l'esprit de critique.

Pour pratiquer l'opposition écrite plus haut entre un Nous qui ferait des vraies sciences et les Zautres qui font du faux, le degré de réflexivité zéro suffit : pas besoin de maîtriser ni sa problématique narcissique individuelle, ni la culture groupale reçue, avec sa problématique narcissique collective. Tel est l'esprit de critique : critiquer les Zautres.

Alors que critiquer puis corriger ses propres comportements, sa propre culture héritée, cela exige l'ordre quatre et plus.

Une autocritique historique et exemplaire est celle de Jean Piaget, annonçant qu'il pouvait bien mettre à la poubelle dix ans de sa vie d'expérimentateur en psychologie développementale, parce que interroger et tester des enfants, c'est beaucoup plus difficile que prévu, que les enfants sont tellement avides de se concilier les adultes que l'adulte introduit presque toujours des biais inadmissibles. Il lui avait fallu apprendre à dépister et déjouer ces biais si faciles à introduire dans une expérimentation.
« Modifié: octobre 28, 2010, 11:17:43 par Jacques »
La science se distingue des autres modes de transmission des connaissances, par une croyance de base : nous croyons que les experts sont faillibles, que les connaissances transmises peuvent contenir toutes sortes de fables et d’erreurs, et qu’il faut prendre la peine de vérifier, par des expériences