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Auteur Sujet: Contraintes géochimiques, genèse des croûtes continentales.  (Lu 15366 fois)

Jacques

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Rappelons le message de Jean-François Moyen, 1er février 2006 :
Citation de: jean-françois Moyen
> Michel Lecomte <m.leco...@wol.be> avait écrit :
>> Bonjour,
>> puis-je vous soumettre une question - peut-être idiote - mais qui me
>> trotte en tête.

>> A-t-on une idée pourquoi la croûte continentale de la terre ne la
>> recouvre que sur 40 pourcent de la surface?
>> Quelle est l'origine de cette différence fondamentale avec la croûte
>> océanique?

Ploum, ploum.... dit le Jeff dont c'est à peu près le sujet de
recherche...

* Les différences entre la CO et la CC :
- D'abord l'épaisseur. La CO fait typiquement 5-10 km, la CC 30-40
d'épaisseur. Entre parenthèse, ca implique donc que les volumes des
deux sont sensiblement équivalents, il y a même un peu plus de CC que
de CO.

- Ensuite, la composition. En regardant de loin, la CO est basaltique
et la CC granodioritique (ou andésitique); si on regarde ce que ca veut
dire en terme de composition, ca fait 50 % de SiO2 dans la CO et 57
dans la CC, mais par exemple 12 % de MgO dans la CO et 3 % dans la CC.
Minéralogiquement, la CC est faite de feldspaths (alcalins) et de
quartz; la CO de pyroxènes et de feldspath plagioclase.
Evidemment, tout ça est à la très grosse louche, parce que il y a
d'autres roches présentes dans les deux cas, d'autres minéraux, des
hétérogénéités chimiques, etc.

- Une conséquence de ça, ce sont les propriétés physiques. La CC est
assez peu dense (2.7, contre 2.9 pour la CO). Ce qui rend la CC très
dure à recycler (par subduction).

- Et ce qui amène à une autre propriété : la CC, à peu près
insubductable, est vieille (80 % du volume s'est formé entre 4.0 et 2.5
Ga), tandis que la CO est jeune (il n'en existe pas de plus agée que
250 Ma, soit 0.25 Ga). Ca ne veut pas dire que toutes les *roches* de
la CC soient vieilles; elles sont continuellement recyclées, c'est à
dire érodées, fondues, transformées, etc. Mais tout se déroule plus ou
moins en vase clos, avec pas ou peu (forcément un peu, puisque la CC a
légèrement crû depuis 2.5 Ga) d'apports "juvéniles", comme on dit, cad
d'apports de nouveaux matériaux.

- Enfin, la CC augmente doucement de volume au cours du temps, avec une
courbe sigmoide : croissance très rapide de 4.0 à 2.5 Ga (de quasi-rien
à 80 % du volume actuel), puis plus lente depuis (de 80 à 100 %). Ceci
implique des apports continus de matière... et surtout, des apports qui
font plus que contrebalancer les "pertes". Les pertes, ici, c'est par
exemple l'érosion, qui produit des sédiments qui finissent dans l'océan
et sont subductés et recyclés dans le manteau.

* L'origine de la CO : c'est assez facile. Ce sont des basaltes, et on
connaît une seule façon de les faire, c'est de faire fondre des
péridotites du manteau. En plus, on voit bien ou ca se passe : sur les
dorsales médio-océaniques en majorité.
Dans les détails, il s'agit de fusion par décompression des péridotites :
dans un contexte d'extension entre deux plaques, le manteau remonte
plus vite qu'il ne peut s'équilibrer thermiquement, ce qui cause sa
fusion.

* L'origine de la CC : c'est plus compliqué. En effet, bien que sa
composition *moyenne* soit assez bien calée, la CC est très hétérogène.
On peut donc avoir plusieurs idées :

- La CC se forme en y ajoutant des matériaux de composition proche de
sa composition moyenne (et donc, tout nouvel ajout ne change pas la
composition). C'est le modèle dit "andésitique", probablement le modèle
dominant dans la communauté. Les andésites, ce sont les laves des zones
de subduction; elles sont assez abondantes pour produire un volume de
roche correspondant au taux de croissance observé de la CC. Elles se
forment par fusion de péridotites elles aussi, mais de péridotites
"enrichies" et, surtout, riches en eau. Cette eau est amenée par la CO
subductée (elle a mariné pendant un moment au fond de l'océan et a eu
le temps de récupérer 5-10 % d'eau, qui est relarguée dans le manteau
juste là ou il faut pour l'hydrater et le faire fondre).
Bon, la je simplifie, parce que les matériaux et les processus étaient
sans doute un peu différents en détail avant 2.5 Ga; mais on reste sur
la même idée, de rôle de l'eau de la plaque subductée.

Dans cette hypothèse, le départ de matériaux (sédiments) ne change pas
non plus significativement la composition de la CC, parce que la
composition moyenne des sédiments (sables et argiles des rivières) est
très proche de celle de la CC de toutes façons.

- La CC se forme en y ajoutant des matériaux très différents de la
composition moyenne, dont les compositions se compensent pour "tomber
juste". La moyenne n'aurait alors aucun sens géologique. Possible, mais
on ne voit pas très bien de tels processus géologiques opérer, ca
semble donc peu probable. En tout cas depuis 2.5 Ga, entre 4.0 et 2.5
Ga on peut en effet envisager une croûte bimodale, avec d'une part des
matériaux très ferro-magnésiens et d'autre part des matériaux très
felsiques : ca correspond plutôt bien à ce qu'on voit à l'affleurement
dans les terrains de cette époque. Mais ca ne règle pas le problème de
"aprés 2.5 Ga".

- La CC se forme en y ajoutant des matériaux très différents de la
composition moyenne, puis en enlevant sélectivement "ce qu'il faut"
pour revenir sur la moyenne. C'est une idée moins farfelue qu'il n'y
parait, proposée par quelques personnes qui disent que, en volume, une
des choses qui apportent énormément de matière à la CC, ce sont les
grandes provinces basaltiques intra-continentales type Deccan, ou
intra-océaniques type Ontong-Java ultérieurement soudées au continent
par des mouvements tectoniques.

Il faut alors, pour revenir à la moyenne, enlever des matériaux très
basiques, et deux processus permettraient de le faire : d'une part,
l'érosion et le transport d'ions dissous dans les rivières (et non plus
de sédiments solides, comme avant), qui transporte préférentiellement
des choses comme Fe, Mg, Ca; d'autre part, des processus dits de
"délamination de racine", selon lesquels la base d'une CC épaissie dans
une chaîne de montagne pourrait se détacher et tomber dans le manteau.
Comme la base de la CC a tendance à être plus Fe-Mg que son sommet, ca
peut marcher.

* Au final, à cette échelle, on parle d'un très grand cycle CC <->
manteau. D'une certaine façon, la CO qui retourne au manteau par
subduction en 0.25 Ga fait partie du manteau. Ce cycle-là donne-t-il
une contrainte forte sur le volume maxi de CC ? Ce n'est pas certain;
on peut juste penser qu'on est en train de regarder un moment donné de
l'histoire de la Terre, et que la CC va continuer, progressivement, à
croître. Les 40 % actuels ne représenteraient, dans ce cas, rien du
tout...

Mais on peut aussi penser qu'il y a une limite fondamentale; cette
limite, c'est la quantité d'éléments chimiques appropriés qu'on trouve
dans le manteau --et même, dans le manteau supérieur, les 600 premiers
kilomètres : les processus décrits plus haut ne peuvent en effet que
difficilement affecter du manteau très profond. Des éléments comme le
potassium (3 % dans la CC, mais 0.1 % dans le manteau) sont importants
pour la CC (ils jouent un rôle structurel majeur dans des minéraux
importants); la quantité totale de CC est donc limitée par la quantité
de K disponible.
De fait, on observe à l'heure actuelle un manteau stratifié, avec
globalement un manteau supérieur "appauvri", qui a perdu les éléments
constituant la CC, et un manteau supérieur non-appauvri, sans doute
proche du manteau original, chondritique (cf. l'autre discussion sur le
noyau etc. dans fsg). On peut penser qu'il n'est plus possible
d'extraire de grandes quantités de CC du manteau appauvri, ce qui
fatalement en limite fortement la production.

* Et donc, ce qui fait la spécificité de la CC, quel que soit le sens
dans lequel on retourne le problème, c'est ... l'eau. Dans le modèle
andésitique, l'eau est indispensable à la formation des andésites. Dans
le modèle "bimodal", elle est aussi indispensable au composant
"felsique". Enfin, dans le troisième modèle... bon, c'est moins net,
mais enfin, il faut de l'altération et des ions dissous.
D'autre part, si la CC moyenne est andésitique, ca ne veut pas dire que
toutes les roches continentales le soient. Une des roches fréquentes de
la CC, c'est le granite, et celui-ci ne se forme que si il y a de
l'eau.

A l'inverse, la CO a un comportement très "passif" vis à vis de l'eau.
Ce corps ne joue aucun rôle dans la formation des basaltes; ensuite, il
y a certes plein d'eau dans la CO, mais c'est juste par infiltration et
par altération des minéraux de la CO, elle ne joue pas d'autre rôle que
"d'être là". On peut faire de la CO sans eau (d'une certaine façon,
c'est ce qu'on voit sur la Lune --basaltes des mers-- ou Mars). On ne
peut pas faire de CC sans eau.

>> Serait-ce possible qu'à l'origine, il y ait eu 2 protoplanètes: une plus
>> petite et une plus grosse. La plus grosse -plus chaude- n'ayant pas
>> encore formé de croûte, et une plus petite -déjà refroidie en surface-
>> recouverte de ce qui sera par la suite notre croûte continentale.

Difficile à imaginer, parce que la CC n'est pas uniquement une croûte
refroidie et figée : c'est un objet avec des propriétés, chimiques en
particulier, bien différentes de ce qu'il y a en dessous.

>> Si les deux se rapprochent et fusionnent (pas trop brutalement) par le
>> jeu des attractions différentielles, la croûte de la petite ne
>> pourrait-elle pas résister en partie au cataclysme et former ainsi le
>> Gondwana partiellement disloqué par l'augmentation subit du manteau?

C'est à peu près impossible, le Gondwana est un continent qui a existé
durant l'ère primaire (vers 500 Ma); à peu près toute la CC était déjà
formée à cette époque là. Pire encore, on arrive à faire des
reconstitutions du mouvement des plaques jusque vers 800 Ma ou 1 Ga,
avec des jeux de collision, séparation, etc.

Par contraste, la formation du système solaire et des planètes date de
4.5 Ga. Vers 0.5 Ga, les proto-planètes seraient toutes refroidies et
il ne semble pas possible d'en préserver une chaude, non différenciée,
jusqu'à cette période.

Et puis, on voit très bien des structures géologiques plus anciennes
que le Gondwana (on a des choses de 3.2 ou 3.5 Ga parfaitement
préservées, avec des fossiles et tout !), c'est difficilement
compatible avec un impact majeur qui aurait tout cassé ... ou au moins,
affecté les roches de façon visible.

>> de
>> là les déchirures comme entre l' Afrique-Europe et les Amériques.

Le timing ne marche pas, ca se passe vers 200 Ma.

JF

Citation de: Jacques Lavau
Ha bin ! Comme actualisation des connaissances ! Moi qui en étais
resté au dilemne si anatexite ou si Anna t'excite pas...
Mais bon, je savais tout de même que l'eau est indispensable à la
cristallisation du granite (expérience de synthèse en labo), et
notamment à celle du quartz.
Je savais l'opposition : beaucoup de granite, peu d'andésite, beaucoup
de basalte, peu de gabbro ; mais je ne savais pas la relier à la
présence ou l'absence d'eau en profondeur.
Je ne savais pas relier l'eau à la différenciation du granite d'avec
les matériaux non crustaux. J'ignorais aussi la très faible proportion
de potassium dans le manteau, et l'hypothèse que ce soit par
appauvrissement au profit de la croûte continentale.
Or, pas de muscovite ni de biotites sans potassium, si les
plagioclases savent s'en passer...

En tout cas, merci pour une intervention aussi riche et de qualité,
alors que le topic de départ faisait plutôt hausser les épaules.
Notamment par le timing farfelu, comme tu l'as fait remarquer avec
beaucoup de discrétion et de courtoisie.

Il me reste que j'ai beaucoup de mal à me figurer le mécanisme de
montée d'un pluton granitique, malgré tous les schémas présents dans
les livres. Notamment je m'explique mal par quels mécanismes les
matériaux surincombants sont éliminés ou digérés. Nous avons quelques
plutons granitiques isolés remarquables dans le Cotentin : un derrière
Carolles, d'autres plus au Nord, dont au moins un (Carteret ?), et son
auréole de métamorphisme, sont présents dans beaucoup de manuels de
géologie de collège.

La présence d'eau dans le pluton est attestée de manière spectaculaire
à Larderello, où elle est exploitée et pour alimenter une centrale
géothermique, et comme source d'acide borique.

Citation de: Jean-François Moyen
Jacques Lavau avait soumis l'idée :

> La présence d'eau dans le pluton est attestée de manière spectaculaire
> à Larderello, où elle est exploitée et pour alimenter une centrale
> géothermique, et comme source d'acide borique.

Oui.. Mais attention, il y a "eau" et "eau". Ce dont j'ai surtout
parlé, plus ou mons explicitement, c'est l'eau constitutive des
minéraux (biotites en particulier). Ce que tu évoques là, c'est plutôt
de l'eau "libre", hydrothermale, qui se ballade dans les pores ou les
fissures. Pas forcément la même... quoi que, lors de la cristallisation
d'un granite l'eau du magma va d'abord former les mnx hydratés, puis,
lorsqu'il y en aura en excès, formera une phase séparée.

JF

--
J.-F. Moyen
http://moyen.free.fr


Citation de: Jean-François Moyen
Le 01/02/2006, Jacques Lavau a supposé :

> Mais bon, je savais tout de même que l'eau est indispensable à la
> cristallisation du granite (expérience de synthèse en labo), et
> notamment à celle du quartz.

Je parlais, principalement, de ce qui se passe lors de la fusion qui
est à la source des magmas andésitiques (ou granitiques). Mais c'est
vrai que ca marche aussi pour la cristallisation.

> Je ne savais pas relier l'eau à la différenciation du granite d'avec
> les matériaux non crustaux. J'ignorais aussi la très faible proportion
> de potassium dans le manteau, et l'hypothèse que ce soit par
> appauvrissement au profit de la croûte continentale.

J'ai pris K, parce que c'est un élément majeur (ie, il est
indispensable pour constuire des minéraux). Mais ces appauvrissements
se voient aussi pour d'autres éléments... en fait pour tout les
"incompatibles", typiquement les gros cations peu chargés. Des choses
comme Rb, les terres rares, Nb ... sont assez appauvries dans le
manteau sup, et, en "miroir", enrichies dans la CC.

> Or, pas de muscovite ni de biotites sans potassium, si les
> plagioclases savent s'en passer...

... mais pas les feldspaths potassiques (hé...)

JF

--
J.-F. Moyen
http://moyen.free.fr

Citation de: Jean-François Moyen
Après mure réflexion, Jacques Lavau a écrit :

> Il me reste que j'ai beaucoup de mal à me figurer le mécanisme de
> montée d'un pluton granitique, malgré tous les schémas présents dans
> les livres. Notamment je m'explique mal par quels mécanismes les
> matériaux surincombants sont éliminés ou digérés. Nous avons quelques
> plutons granitiques isolés remarquables dans le Cotentin : un derrière
> Carolles, d'autres plus au Nord, dont au moins un (Carteret ?), et son
> auréole de métamorphisme, sont présents dans beaucoup de manuels de
> géologie de collège.

Ah, ben si tu me branches là dessus, ca va pas faire avancer mon cours
pour Lundi (... de pétro magmatique. En un sens, il y a un lien !).

Tu soulèves là un assez gros lièvre, en fait un des problèmes majeurs
de la géologie des granites. Et un problème que ... au risque d'être
présomptueux, qu'on commence à comprendre depuis une vingtaine d'années
(une étape majeure, c'est la "Hutton conference" de 1996 au Maryland,
ou le paradigme actuel a à peu près été dessiné). Pas étonnant donc que
ces notions ne soient pas encore sorties de la communauté au sens le
plus restreint !

Le paradigme actuel sépare plusieurs étapes lors de la formation des
granites (pour simplifier, je considère des granites formés au sein de
la CC, sans apports mantelliques. C'est pas tout à fait vrai, mais
conceptuellement ca permet de comprendre et c'est pas entièrement faux
non plus) :
- formation des magmas (fusion partielle);
- extraction des magmas (qui restent, sinon, piégés dans leur source
--les anatexites, justement !)
- transfert vers la surface
- mise en place, sous forme de plutons

La fusion se déroule typiquement dans la croûte profonde (il faut 850
°C, ce qui est très dur à moins de 15-20 km, même en trichant avec les
gradients). On peut donc trouver des intrusions de granite à tous
niveaux, depuis les sites de formation jusqu'à presque la surface (pas
en surface à proprement parler ... sinon c'est un volcan !). Si on est
dans la croûte inférieure, il peut s'agir de liquides magmatiques qui
n'ont pas, ou très peu, bougé depuis leur formation.
On l'observe typiquement dans le massif du Velay, ou on voit, en
continuité, des roches pas ou peu fondues; des roches fondues
("anatexites" ou "migmatites"); des granites riches en matériel solide
mal isolé; des granites "propres". Ces granites sont donc des liquides
qui ont gelé sur place ou quasiment sur place, peu après la fusion. Ce
genre de choses était décrit (est encore ...) comme des "massifs
granitiques à bord diffus".

Si on veut faire des petits plutons dans la croûte supérieure, comme
celui auquel tu fais allusion (c'est Flamanville -- et c'est
l'archétype, du moins en France, du pluton de domaine superficiel),
c'est à dire mis en place à 3-10 km de profondeur, disons, il est
nécessaire d'extraire les liquides de leur source; de les transporter
vers la surface; de les mettre en place dans un "volume" superficiel.

* L'extraction des liquides
Il y a deux processus évoqués pour extraire les liquides de roches
partiellement fondues :
- la gravité, les liquides étant plus légers que les roches solides
environantes vont remonter tout naturellement (si leur viscosité le
permet, si il y a une "porosité" interconnectée, etc.), et le reste va
rester au fond.
- des surpressions, liées à la déformation en particulier. En gros
c'est le principe de l'éponge : on presse, et le liquide sort. Il y a
de superbes exemples de terrain de ça, ou on voit par exemple des plis
dans des migmatites avec le liquide concentré dans le coeur du pli.
Vous mettrai ça en ligne quand mon cours de pétro en sera arrivé là...
:-)
(cf. papiers de Brown, Sawyer...)

On arrive donc, à ce stade, à des petites poches de liquides métriques
ou décamétriques, qui vont sans doute se regrouper progressivement.

* Le transfert vers la surface
Il a forcément eu lieu, pour les granites de faible profondeur...
Physiquement, c'est sans doute la densité des magmas qui joue le rôle
moteur principal; suivi par, peut être, des surpressions tectoniques
(liées à la déformation), mais là on se tape dessus pour savoir si ca
peut avoir un effet suffisant ou si c'est négligeable.

L'autre gros débat, c'est le mode de transport au travers de la croûte.
On commence à arriver à se mettre d'accord, mais ca a été un gros sujet
d'engueulade dans les années 90 (papiers de Clemens, Hutton, Mawer...)
:

- Historiquement, le premier modèle proposé été celui du "diapirisme" :
la "bulle" de magma, plus légère, remonte en masse vers la surface, un
peu comme un ballon d'air chaud, ou comme ces bulles de liquide chaud
qui remontent dans les lampes fantaisie. C'est de là que vient le
fameux dessin des plutons granitiques comme des petites bulles avec une
queue, qui traîne partout.

Le diapirisme est un processus qui est possible, mais à condition que
les matériaux soient assez ductiles. Dans la croûte inférieure, il peut
arriver; mais dans la croûte supérieure, les roches sont trop rigides
pour qu'ilsoit possible (c'est l'argument d'un fameux papier de, je
crois, Clemens et Petford, en 92).

/* Noter aussi que le diapirisme peut affecter toute sortes de roches,
pas seulement des granites. Les migmatites, en masse, peuvent former
elles aussi des dômes diapiriques (cf. Vanderhaeghe, Teyssier -- années
2000; Brun, Van den Driesche - années 80). Des roches solides de la
croûte inférieure forment aussi de telles dômes, sans fusion (ou avec
très peu), à condition que la croûte soit très chaude, comme c'était
peut être le cas à l'Archéen (Choukroune, Chardon, Bouhallier -- années
90; van Kranendonk -- années 90-2000, pour ne citer que la "résurgence"
moderne de ces concepts, proposés dès les années 50), ou dans certaines
chaînes de montagnes (Mahéo & Guillot, Himalaya, 2002). On connaît des
diapirs de sel dans toutes les chaînes de montagne (le Jura, sans
chercher très loin). Et dans lemanteau, il y a sans doute des diapirs
de péridotite solide. */

- Dans les années 80-90, le nouveau modèle proposé est celui du
"dyking" : les magmas, plutôt que de former des grosses boules, montent
vers la surface dans des petits filons ("dykes"), qui utilisent des
fractures cassantes. Ces dykes servent de zone d'alimentation aux
plutons superficiels proprement dit, qui se mettent en place non pas
comme un diapir, en masse; mais plutôt comme un ballon qu'on gonfle peu
à peu (on a parlé de "ballooning" à l'époque, le terme est un peu passé
de mode) (Clemens, Petford, Mawer, etc. -- années 90).

Un autre argument fort, ca a été l'observation sous les plutons de
zones de "racine", de "cheminées d'alimentation", bien décrites par la
gravi par exemple (Vigneresse, années 80-90), et suggérant qu'il y
avait un "tuyau" pour remplir le pluton par en dessous...

- Vers le même moment, on a proposé des variantes du dyking, basé sur
la circulation et l'injection des magmas non pas tant dans des
fractures cassantes, ouvertes (peu probable dans la croûte inf du reste
!), mais plutôt le long de failles ("shear zones") (Hutton, 1992;
Moyen, 2000).

- A l'heure actuelle, on penche plus pour des combinaisons de tout ces
processus. Le diapirisme est possible dans la croute inf, mais affecte
sans doute plutôt en masse des terrains composites migmatites-granites,
avec les liquides mal séparés. Les circulations sur shear zones, voire
les dykes, prennent sans doute le relai dans les zones plus
supérieures.

Un problème, c'est que sauf exception on ne voit pas à l'affleurement
ce genre de zones de transfert. Peut être parce que, justement, le
magma n'a fait "que passer", et qu'il n'y a plus rien à voir ?
(Sawyer).

* La mise en place des plutons
.. cad des plutons superficiels, puisqu'on a à peu près traité le cas
des intrusions profondes...

Dans la croute sup, on exclut à peu près le diapirisme à l'heure
actuelle. C'est là que se pose avec accuité le problème de place :
comment faire assez d'espace pour mettre la matière granitique ? En
fait, ce problème se pose un peu en profondeur aussi... mais moins :
pour les dykes, bon, ce sont des petites fractures, ce n'est pas très
grave en terme de volume; pour les diapirs c'est plus gênant mais on a
un joker, la plupart des diapirs se mettent en place en contexte au
moins localement extensif, ce qui permet de faire toute la place qu'on
veut.

Mais pour les intrusions de haut niveau ? La encore, schématiquement on
peut imaginer trois choses :

- On ne fait pas de place et on "assimile" ou on "digère" sur place les
roches encaissantes. Mais ca ne crée pas vraiment de place...

- On fait de la place "par le haut", en créant un bombement en surface :
c'est ce qui se passe dans les intrusions sous les volcans, par
exemple, qu'on voit gonfler au fur et à mesure que l'éruption approche
! C'est peut être la façon dont se forme les "laccolithes", des
injections plates qui s'insèrent entre deux couches. C'est dur à dire,
parce que si on voit le laccolithe, justement, tout ce qui était au
dessus est parti (érosion) : pas moyen, donc, de savoir si ca a remonté
ou pas. En fait, si le laccolithe est assez profond, on peut surement
distribuer la déformation assez loin, en faisant un peu de compression
par ci, un peu de bombement par là... et ca pourrait être assez
discret. (Cruden, 90-2000)

- On fait de la place "sur les cotés". On retombe sur les histoires de
tectonique. Les failles, souvent, permettent de créer de l'espace, que
ce soit en écartant un peu leur lèvres (failles un peu extensives), ou
grâce à des petites irrégularités qui créent des structures dites en
"pull-apart"

J'essaye un dessin : si la faille ci-dessous est dextre, la petite
irrégularité va s'aggrandir pour former un "trou" ...

------\
       \
        \--------------

.. comme ça :

------\----\
       \    \
        \----\----------

Dans ce trou (losangique), on peut donc mettre en place un granite !
(cf. Benn, 95-2000)

En fait, ca impose donc des contextes avec au moins localement un peu
d'extension. Mais ce n'est pas un problème; quand on regarde un tout
petit peu, il y a de l'extension partout, même dans les zones de
convergence les plus convergentes .... Les Alpes sont pleines de
failles normales par exemple.

On a plein de jolis exemples de plutons qui se sont mis en place de
façon syn-tectonique, dans ou à proximité d'une faille. Par exemple
ceux de Bretagne Sud (Gapais, années 80) ou des Pyrénées (Bouchez et
cie, années 80-90), ou encore de Sierra Nevada (Tikoff et St Blanquat,
années 90-présent). En refroidissant, les plutons enregistrent la
déformation liée à la faille, et on voit très bien le lien
faille/granite.

/* C'est dans ce contexte que se place le "métamorphisme de contact" :
le granite, chaud, se mettant en place dans la croûte sup plus froide,
peut la "cuire", comme de l'argile est cuit en brique dans un four de
potier. Il se forme une petite auréole métamorphique, de 500-1000 m
typiquement, autour du pluton. Enfin, si les roches s'y prêtent. */

JF

--
J.-F. Moyen
http://moyen.free.fr

Citation de: Jacques Lavau
Merci, je suis comblé et confus, d'avoir obtenu tant avec des
questions toutes couillonnes.

On voit des photos saisissantes de diapirs de sel au Kuh i Namak,
région de Qum, Iran, dans le Manuel de sédimentologie de André Vatan,
Editions Technip. La montée de sel s'est accompagnée de venues de
roches volcaniques andésitiques. Cela va bien avec ton exposé
d'expansion latérale locale.

Cinq pages plus haut, il détaille la formation de dolomites
évaporitiques dans le Kara Bogaz.

Page 208, il est rappelé que la glauconie se forme généralement dans
les mers épicontinentales, entre 50 et 200 m de profondeur. Dans tous
les cas, soit en solution, soit en détritique, le fer vient des
continents.

Je ne suis pas géologue, mais j'ai dû acquérir des connaissances en
plus de notre minéralogie de base, pour pouvoir comprendre nos
carrières potentielles, et celles de nos clients. Au final, cela n'a
servi à rien du tout : le procédé a été abandonné.
« Modifié: juillet 09, 2008, 05:56:35 par Jacques »
La science se distingue des autres modes de transmission des connaissances, par une croyance de base : nous croyons que les experts sont faillibles, que les connaissances transmises peuvent contenir toutes sortes de fables et d’erreurs, et qu’il faut prendre la peine de vérifier, par des expériences

Jacques

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Contraintes géochimiques, potassium et genèse des croûtes continentales.
« Réponse #1 le: juillet 09, 2008, 05:59:30 »
Avant recyclage par les convergences, dont les subductions, la sédimentation des argiles sur le fond marin, glauconites et illites par exemple, enrichit cette couche sédimentaire en potassium, au dépens des solutés des océans. Potassium qui est ensuite injecté en croûte continentale, sous forme de plutons granitiques, où on le retrouve en feldspath orthose, en muscovite et biotite.

Cette sélectivité extrême des argiles micacées et des micas pour le potassium, est le mécanisme géochimique clé, qui a permis l'édification des croûtes continentales granitiques, à partir des croûtes océaniques, et il y a fallu quelques milliards d'années.

C'est à cette sélectivité lors de la synthèse des argiles marines des grands fonds, que l'on doit que la mer est salée de sodium et non de potassium, alors que les sédiments sont pauvres en sodium, riches en potassium.

Oui il existe bien un mica sodique, un seul, et d'une grande rareté : la paragonite. On ne la trouve que dans des environnements totalement carencés en potassium, riches en sodium. Très très rares.

L'existence de ce mécanisme d'accumulation exceptionnellement forte de potassium dans les sédiments marins, implique que les toutes premières petites croûtes continentales de l'âge archéen, n'ont pu survenir que par différenciation magmatique produisant du granite ou des andésites à partir des sédiments enrichis en potassium, au fond de ces premiers océans. Rien de semblable n'a pu se produire sur la Lune, faute d'océan pouvant produire des argiles micacées.

La composition de cet océan primitif archéen est inconnue. On est certains qu'elle était fort différente de l'eau de mer actuelle : elle était réductrice, riche en fer ferreux, et le rapport Na/K devait être encore proche de 1. On peut soupçonner, par la survie d'Alain Bombard avec une presse à poissons, que la force ionique de l'océan primitif était bien moindre que celle que nous connaissons à présent.
« Modifié: juillet 11, 2008, 12:02:44 par Jacques »
La science se distingue des autres modes de transmission des connaissances, par une croyance de base : nous croyons que les experts sont faillibles, que les connaissances transmises peuvent contenir toutes sortes de fables et d’erreurs, et qu’il faut prendre la peine de vérifier, par des expériences

Jacques

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Entêtement à nier les contraintes expérimentales.
« Réponse #2 le: juillet 09, 2008, 06:37:40 »
Citation de: Florian
Florian a écrit :
> Jacques Lavau <Nolavauspamjac@klube_internaite.effaire> wrote:
>
>
>>Bref : tu t'agites, tu fais des moulinets avec tes bras, mais tu
>>n'échappes toujours pas au fait que dans ces convergences, du matériau
>>est enfoui en profondeur, et recyclé de plusieurs façons, via des
>>différenciations magmatiques.
>
>
> Il y a une différence entre un enfouissement de quelques centaines de km
> de lithosphère qui vont en effet altérer la composition des matériaux
> qui montent, et recyclage de 10000 km de lithosphère en moins de 200 Ma.


Et il a encore oublié l'énormité de la différence de composition entre
croûte continentale et croûte océanique (simple basalte, comme sur la
Lune) :

12 % de MgO dans la CO et 3 % dans la CC.
Potassium : 3 % dans la CC, mais 0.1 % dans le manteau.

Un enrichissement de trente fois en potassium, avec des procédés de
faible rendement en séparation magmatique, implique d'avoir recyclé au
moins trente fois plus, et en fait largement davantage, de croûte
océanique vers les profondeurs du manteau, qu'il ne s'en est remonté en
plutons granitiques, et laves de volcans gris, formant les croûtes
continentales.

Fin définitive de la thèse : "Il n'y a pas de subductions" : réfutée
depuis longtemps par les contraintes expérimentales de la géochimie et
de la lithologie.

--
"Expansion terrestre" et négation des subductions.
Florian Nachon, Claude Blot, "transmigration d'énergie", NCGT, Samuel Carey, neutrinos gonfleurs... Ces farfelus qui militent pour une Terre deux fois plus petite, huit fois plus légère voici 200 Ma, et sans croûte océanique, rien que de la croûte continentale...
http://deonto-ethics.org/impostures/index.php/board,21.0.html
« Modifié: juillet 13, 2008, 06:12:06 par Jacques »
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Jacques

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« Modifié: janvier 20, 2014, 08:24:34 par Jacques »
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Re : Contraintes géochimiques, genèse des croûtes continentales.
« Réponse #4 le: septembre 24, 2008, 12:25:40 »
Rappel du cours de convection mantellique :
http://planet-terre.ens-lyon.fr/planetterre/objets/Images/convection-2005-04-01/

Citer
Date: Tue, 15 Jan 2008 00:14:45 +0100
From: Jacques Lavau <Nolavauspamjac@klube_internaite.effaire>
Newsgroups: fr.sci.geosciences,fr.sci.zetetique
Subject: Re: pour en finir avec la =?windows-1252?Q?pol=E9mique_idiote_?=
 =?windows-1252?Q?sur_la_tectonique_de s_plaques_!?=
References: <4772b283$0$881$ba4acef3@news.orange.fr> <47736852$0$28126$426a34cc@news.free.fr> <1i9sv58.g333z21jak46 2N%first_name@last_name.net> <47754caa$0$31112$426a34cc@news.free.fr> <1i9ut72.stw5qv3n4xxq N%first_name@last_name.net> <477608cb$0$14260$426a74cc@news.free.fr> <1i9wh55.w8q9kj15k1tx yN%first_name@last_name.net> <4778d454$0$15290$426a34cc@news.free.fr> <1i9zmeo.17u3cv4t4b8c gN%first_name@last_name.net> <477a1d3a$0$27941$426a34cc@news.free.fr> <1ia3eyz.11ojqcl6ew3m 7N%first_name@last_name.net> <477c024d$0$15833$426a74cc@news.free.fr> <1ia5z7j.1iy0gz9cqo6r kN%first_name@last_name.net> <47814ff8$0$7040$426a34cc@news.free.fr> <1iabl93.1eqx9g41cc0z jgN%first_name@last_name.net> <fm6gqh$6eu$1@news.tiscali.fr> <1iajp0l.6einhgnaop1o N%first_name@last_name.net>
In-Reply-To: <1iajp0l.6einhgnaop1o N%first_name@last_name.net>
Message-ID: <478bec72$0$21145$7a628cd7@news.club-internet.fr>
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NNTP-Posting-Date: 14 Jan 2008 23:12:50 GMT
X-Trace: 1200352370 news.club-internet.fr 21145 89.85.78.61
X-Complaints-To: abuse@club-internet.fr

Florian a écrit :
> Coin-coin <Coin-c...@tiscali.fr> wrote:
>
>> Dans l'Atlantique, les planchers les plus anciens sont bien associés à une
>> subduction (de la mer des Caraïbes).
>
> En êtes vous si sûr?
> Regardez bien cette vue montrant les deux zones les plus anciennes de
> l'atlantique:
>
> http://nachon.free.fr/GE/oldestfloor/atlantic2.png
>
> Il est évident qu'il n'y a pas de zones de Wadati-Benioff le long de la
> côte africaine et de la côte est-américaine, là où est localisé le
> plancher le plus ancien (150 à 180 Ma). Donc l'ancienneté du plancher,
> sa densité et sa température froide ne peuvent pas être des facteurs à
> l'origine de la subduction.

Pfff ! Toujours en train de nous dire que c'est la peau du lait, en
surface de la casserole, qui est le moteur de la convection dans la
casserole...

Oncle Dom nous avait passé le lien sur le cours, niveau vulgarisation,
la moindre des choses est de s'en servir :
http://planet-terre.ens-lyon.fr/planetterre/objets/Images/convection-2005-04-01/

http://planet-terre.ens-lyon.fr/planetterre/objets/Images/convection-2005-04-01/Diapositive21.jpg/image_view_fullscreen
http://planet-terre.ens-lyon.fr/planetterre/objets/Images/convection-2005-04-01/Diapositive35.jpg/image_view_fullscreen
http://planet-terre.ens-lyon.fr/planetterre/objets/Images/convection-2005-04-01/Diapositive36.jpg/image_view_fullscreen
http://planet-terre.ens-lyon.fr/planetterre/objets/Images/convection-2005-04-01/Diapositive37.jpg/image_view_fullscreen
http://planet-terre.ens-lyon.fr/planetterre/objets/Images/convection-2005-04-01/Diapositive43.jpg/image_view_fullscreen
http://planet-terre.ens-lyon.fr/planetterre/objets/Images/convection-2005-04-01/Diapositive45.jpg/image_view_fullscreen
http://planet-terre.ens-lyon.fr/planetterre/objets/Images/convection-2005-04-01/Diapositive46.jpg/image_view_fullscreen
http://planet-terre.ens-lyon.fr/planetterre/objets/Images/convection-2005-04-01/Diapositive48.jpg/image_view_fullscreen
http://planet-terre.ens-lyon.fr/planetterre/objets/Images/convection-2005-04-01/Diapositive51.jpg/image_view_fullscreen
http://planet-terre.ens-lyon.fr/planetterre/objets/Images/convection-2005-04-01/Diapositive53.jpg/image_view_fullscreen
http://planet-terre.ens-lyon.fr/planetterre/objets/Images/convection-2005-04-01/Diapositive54.jpg/image_view_fullscreen
http://planet-terre.ens-lyon.fr/planetterre/objets/Images/convection-2005-04-01/Diapositive55.jpg/image_view_fullscreen
http://planet-terre.ens-lyon.fr/planetterre/objets/Images/convection-2005-04-01/Diapositive61.jpg/image_view_fullscreen
http://planet-terre.ens-lyon.fr/planetterre/objets/Images/convection-2005-04-01/Diapositive65.jpg/image_view_fullscreen
http://planet-terre.ens-lyon.fr/planetterre/objets/Images/convection-2005-04-01/Diapositive66.jpg/image_view_fullscreen
http://planet-terre.ens-lyon.fr/planetterre/objets/Images/convection-2005-04-01/Diapositive67.jpg/image_view_fullscreen
http://planet-terre.ens-lyon.fr/planetterre/objets/Images/convection-2005-04-01/Diapositive69.jpg/image_view_fullscreen
Donc le moteur n'est pas dans la croûte, mais dans les différences de
densité du MANTEAU.
Es-tu têtu, donc !

http://planet-terre.ens-lyon.fr/planetterre/objets/Images/convection-2005-04-01/Diapositive73.jpg/image_view_fullscreen
http://planet-terre.ens-lyon.fr/planetterre/objets/Images/convection-2005-04-01/Diapositive76.jpg/image_view_fullscreen
http://planet-terre.ens-lyon.fr/planetterre/objets/Images/convection-2005-04-01/Diapositive77.jpg/image_view_fullscreen
http://planet-terre.ens-lyon.fr/planetterre/objets/Images/convection-2005-04-01/Diapositive79.jpg/image_view_fullscreen
http://planet-terre.ens-lyon.fr/planetterre/objets/Images/convection-2005-04-01/Diapositive82.jpg/image_view_fullscreen
http://planet-terre.ens-lyon.fr/planetterre/objets/Images/convection-2005-04-01/Diapositive83.jpg/image_view_fullscreen
http://planet-terre.ens-lyon.fr/planetterre/objets/Images/convection-2005-04-01/Diapositive85.jpg/image_view_fullscreen
http://planet-terre.ens-lyon.fr/planetterre/objets/Images/convection-2005-04-01/Diapositive86.jpg/image_view_fullscreen
http://planet-terre.ens-lyon.fr/planetterre/objets/Images/convection-2005-04-01/Diapositive87.jpg/image_view_fullscreen
Etc...

Le guerrier Ajax, aussi têtu que l'âne sur le dos duquel les enfants
cassent trois bâton, avant de réussir à le faire sortir du champ de
blé...
Homère, Iliade.
Look familiar ?
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Jacques

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Anomalie en magnésium, continents versus manteau.
« Réponse #5 le: décembre 22, 2008, 06:28:50 »
En février 2006, Jean-François Moyen nous avait décrit la grosse différenciation en potassium, des croûtes continentales aux dépens du manteau, copie à
http://deonto-ethics.org/impostures/index.php/topic,97.0.html

Voici un autre travail sur le différenciation en magnésium :
http://www.sciencedaily.com/releases/2008/04/080401112403.htm

Continents Loss Of Dense Matter To Oceans Helps Keep Continents Above The Mantle

ScienceDaily (Apr. 3, 2008) — New research suggests that the geological staying power of continents comes partly from their losing battle with the Earth's oceans over magnesium. The research finds continents lose more than 20 percent of their initial mass via chemical reactions involving the Earth's crust, water and atmosphere. Because much of the lost mass is dominated by magnesium and calcium, continents ultimately gain because the lighter, silicon-rich rock that's left behind is buoyed up by denser rock beneath the Earth's crust.

Citer
The Earth's continents seem like fixtures, having changed little throughout recorded human history. But geologists know that continents have come and gone during the Earth's 4.5 billion years. However, there are more theories than hard data about some of the key processes that govern continents' lives.

"Continents are built by new rock that wells up from volcanoes in island arcs like Japan," said lead author Cin-Ty Lee, assistant professor of Earth science at Rice University. "In addition to chemical weathering at the Earth's surface, we know that some magnesium is also lost due to destabilizing convective forces beneath these arcs."

Lee's research, which appeared in the March 24 issue of the Proceedings of the National Academy of Science, marks the first attempt to precisely nail down how much magnesium is lost through two markedly different routes -- destabilizing convective forces deep inside the Earth and chemical weathering reactions on its surface. Lee said the project might not have happened at all if it weren't for some laboratory serendipity.

"I'd acquired some tourmaline samples in San Diego with my childhood mentor, Doug Morton," Lee said. "We were adding to our rock collections, like kids, but when I got back to the lab, I was curious where the lithium, a major element in tourmaline, needed to make the tourmalines came from. I decided to measure the lithium content in the granitic rocks from the same area, and that's where this started."

In examining the lithium content in a variety of rocks, Lee realized that lithium tended to behave like the magnesium that was missing from continents. In fact, the correlation was so close, he realized that lithium could be used as a proxy to find out how much magnesium continents had lost due to chemical weathering.

Continents ride higher than oceans, partly because the Earth's crust is thicker beneath continents than it is beneath the oceans. In addition, the rock beneath continents is made primarily of silicon-rich minerals like granite and quartz, which are less dense than the magnesium-rich basalt beneath the oceans.

Lee said he always assumed that processes deep in the Earth, beneath the volcanoes that feed continents, accounted for far more magnesium loss than weathering. In particular, a process called "delamination" occurs in subduction zones, places where one piece of the Earth's crust slides beneath another and gets recycled into the Earth's magma. As magma wells up beneath continent-feeding volcanoes, it often leaves behind a dense, magnesium-rich layer that ultimately founders back into the Earth's interior.

In previous research, Lee found that about 40 percent of the magnesium in basaltic magma was lost to delamination. He said he was thus surprised to find that chemical weathering alone accounted for another 20 percent.

"Weathering occurs in just the top few meters or so of the Earth's crust, and it's driven by the hydrosphere, the water that moves between the air, land and oceans," Lee said. "It appears that our planet has continents because we have an active hydrosphere, so if we want to find a hydrosphere on distant planets, perhaps we should look for continents."
Adapted from materials provided by Rice University, via EurekAlert!, a service of AAAS.

En comparaison de la différenciation potassium :
Les rivières emmènent à la mer les cations solubles, qui ne reviennent pas tous, dont Mg.
Délamination des racines de continent : surnage la partie plus riche en Si (et K), coule et est recyclée la partie la plus riche en Mg et Fe.
Différenciation dans les poches magmatiques de subduction : la partie riche en Mg coule, tandis que montent soit des plutons granitiques, soit des laves grises.

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Recueil des autres interventions de JF Moyen sur les subductions.
« Réponse #6 le: mars 02, 2009, 01:56:48 »
2 février 2007 :
Citation de: Jean-François Moyen
"Earth expansion".. Oui, c'est un vieux serpent de mer géologique. Pas très vieux en fait, il date des années 70, et il y a surtout quelques personnes qui défendent ce genre de théories.

De ce que j'avais lu (je n'ai pas regardé l'émission d'Arte en question, donc je n'en sais rien, en fait), ca repose sur une ou deux grosses erreurs (ou incompéhensions), et ça entraîne des conséquences... bizarres, au plan épistémologique.

Les deux erreurs de conception fondamentales tournent toutes les deux autour du même problème : les gens qui proposent une Terre en expansion n'ont as du tout compris ce qu'est la théorie de la tectonique des plaques, et au mieux se réfèrent à la version "années 70" de la théorie, quand ce n'est pas au tapis roulant du sea-floor spreading des années 50--60. Or, la tectonique des plaques a pas mal évolué depuis cette époque -- justement parce qu'elle avait, dans sa forme d'alors, un certain nombre de problèmes, ceux qu'exploitent les "expansionnistes". Sauf que ces problèms ont été réglés par les nouvelles versions... Les deux points principaux, ce sont (1) les subductions, (2) le fit des continents.

Les expansionnistes rejettent les subductions (ou la croûte océanique disparait), et affirment que ce sont des inventions ad-hoc des "tectoniciens" qui ne sont supportés par aucune données. C'était peut être le cas il y a 40 ans, mais ce n'est plus vrai maintenant; les zones de subductions sont probablement les objets les plus étudiés de la géologie actuelle, on les a étudié et imagé de toutes les façons possibles. On en connaît la géométrie, la structure gravitaire, on a des idées sur leur température. Plus important, on connaît les mouvements (de convergence) qui s'y déroulent, on voit les deux plaques se rapprocher l'une de l'autre. La sismique nous donne de bonnes idées sur ce qui se passe en profondeur. Enfin, on a un modèle pas trop naze qui explique les types de roches qui s'y forment (andésites et compagnie). Bref, les zones de subductions sont maintenant aussi solidement démontrées et observées que les dorsales.

Les expansionnistes jouent aussi beaucoup sur le "puzzle" continental. Là aussi, ils feraient bien de lire les travaux récents surl'ouverture océanique, en particulier sur le taux de déformation des continents à proximité de la rupture. Je ne sais pas si qqn a essayé de faire des reconstitutions en intégrant les déformaitons intracontinentales (ce serait un foutu boulot, parce que il faudrait quantifier toute la déformation, y compris diffuse...); mais bon, quand on voit qu'une marge passive peut s'amincir de près de 50 % sur une centaine de kilomètres depuis la côte, on comprend assez bien qu'il va être diffiile de faire recoller les morceaux. En gros, c'est un peu comme quand on déchire une pâte à tarte : elle s'amincit avant de se casser, et on va avoir du mal à remettre les deux morceaux côte à côte ! Quant au fit qui marcherait mieux sur une sphère plus petite... Mouais, je demande à voir. Pour finir, que fait-on des traces anciennes (1.0 Ga) d'ouverture océanique, ou encore plus anciennes de rifting, maintenant re-coincées dans une soudure entre deux continents ? Que fait on des régions ou on voit plusieurs cycles d'ouverture et fermeture d'océans, ou au moins plusieurs phases d'extension et de compression ?

La conséquence bizarre est que, pour faire une terre en exansion, il faut chambouler toute la physique et inventer des histoires de neutrinos gonfleurs ou que sais-je encore. En soi, la démarche n'est pas choquante. Sauf que ca amène à créer une physique ... qui est en contradiction avec tout ce que les physiciens observent dans leur labos ! C'est embêtant, d'autant que les physiciens en question, cette physique ils l'utilisent. Par exemple pour faire marcher des cicuits imprimés ou des centrales nucléaires. Et l'un comme l'autre, ça marche : la preuve, c'est que vous me lisez. Pour caricaturer : si la physique permet une Terre en expansion, alors vous ne pouvez pas me lire parce qu'elle ne permet pas de faire fonctionner un ordinateur...

JF


29 février 2008 :

Citation de: Robby

voici (c'etait un crosspost depuis fsz du 27, faut dire).

Jean-François Moyen a écrit :
 > robby <m...@pla.net> wrote:

 >> a propos, le reste de cet exposé n'est pas ininteressant: c'est un
de ceux qui parlent de convection sans que ca passe par des rouleaux
réguliers a l'ancienne (facon Benard).
 >> http://www.isteem.univ-montp2.fr/PERSO/camps/DEA/dea2/img32.htm

 > Ah, ben dans un cours de DEA, c'est pas malheureux, ça fait bien 20
ou 30 ans que tout le monde sait (sauf les auteurs de manuels de Lycée
et les adeptes de la terre-en-expansion) que la convection mantellique
ne peut pas être de grands rouleaux réguliers !
 >
 > Enfin, les trucs de Machetel sont quand même publiés depuis les
années 90 il me semble, c'est donc pas de la science toute neuve. Cette
image en particulier commence à trainer un peu partout...

oui. Mais du coup ca me pose des questions:

1: s'il y a avalanches et intermittance (dans la "plongee", et donc la
subduction), par conservation cette intermittance devrait aussi se lire
dans l'activité des dorsales, j'imagine. Est-ce qu'on la constate ?
(j'avais l'impression que l'activité des dorsales -creation de surface
de plaque oceanique- etait relativement constante dans le temps)

2: tout a l'opposé de l'images de rouleaux sages et régulierement
répartis a la Benard, on a au contraire une circulation s'etalant a
l'echelle du globe: http://ccgm.free.fr/icones/PlateTecto_web.jpg

- coté "plongee-subduction", tout semble regroupé du meme coté (étendu):
on a un noeud-triple en indonésie d'ou partent trois arcs de subduction
(vers fidji-NZ, vers tout l'arc pacifique, et vers
sumatra-himalaya-persique-mediterraneeEst)

- coté dorsales, tout semble regroupé de l'"autre coté" (étendu), en
cercle autour de l'antartique, cercle d'ou partent les dorsales
atlantique, indienne, pacifiqueCentre.

comme j'imagine que l'on considere toujours le mouvement des plaques
oceaniques comme solidaire du manteau, cela suppose des echelles
spatiale de rouleau convectif extremement larges, non ?
(Oui reconstruisès-je mal a un endroit ?)

3: il me semble que le "modele standard" actuel met le "moteur" dans la
plongee des vielles surfaces oceaniques, tirant tout le reste ? Dès lors

- comment le mouvement des plaques oceaniques reste-t-il aussi "solide"
(i.e. homogene), typiquement dans le pacifique, alors que ca plonge de
tous cotés (arc) ?
(solide au sens mecanique: deplacement monobloc "parallele", i.e.
homogene en direction/intensité.)

- les dorsales correspondent purement aux lieux de déchirures, ou bien a
des remontees (fusse par simple conservation d'ou rouleau de convection) ?
   - si ce sont de simple dechirures, pourquoi restent-elles aussi
coherentes (quasi ligne), et pourquoi coincident-elle a des anomalies
macroscopiques (gravité,temperature, magnétisme) ?

   - si ce sont des sites de remontés, comment expliquer de tels
décrochements le long des dorsales (i.e. ils restent fonctionnels: bien
que des morceaux de dorsales soient tres decrochés, ils restent
normalement actifs).

   - ou bien il y a une "zone diffuse de remontee", laissant le loisir
aux dechirures de se disperser un peu, les propriétés mécaniques des
plaques assurant un localement un mouvement "solide homogene" meme si le
rouleau mantelique dessous ne l'est pas autant ?

sinon, a ces decrochements de segments de dorsales correspondent des
failles dans la direction normale, et le fond oceanique semble tapissé
de ces failles extremement longues et paralleles.
Connait-on le mecanisme (et l'activité) de ces failles ?
est-ce juste la memoire de l'emission de matiere le long de dorsales a
decrochement, ou est-ce qu'elles jouent et qu'il y a de leger mouvement
relatifs entre ces "bandes de plancher" normales aux dorsales ?

merci !

--
Fabrice

4 mars 2008.
Citation de: Jean-François Moyen
Remarque préliminaire : l'essentiel des reflexions sur la convection 
(avalanches en particulier) repose sur des modèles numériques, puisqu'on 
n'a évidemment pas le recul temporel nécessaire pour des observations 
directes de ce genre de phénomènes. Les seules observations qu'on puisse 
faire sont celles basées, par exemple, sur la répartition des masses dans 
le manteau (papier de, je crois, Yannick Ricard au début des années 90); 
les masses denses sont sans doute des "paléo-subductions". Bon, mais même 
comme ça, on ne voit pas plus loin que 200 Ma, ce qui reste très court 
pour discuter de phénomènes de l'échelle de 0.5 -- 1 Ga.

Or, la limitation évidente des modèles numériques, c'est qu'ils ne 
ressortent que ce qu'on y rentre... Ceux de Machetel et Brunet, si mes 
souvenirs sont bons, étaient parmi les premiers à prendre en compte un 
important saut de vicosité à la limite manteau inf/manteau sup (660 km); 
avant, les capacités de calcul rendaient ça difficile [je parle de 
mémoire, ce n'est pas absolument mon domaine, mais je me souviens d'avoir 
entendu P. Machetel en conf. à l'époque]. Ils ne sont pas les seuls à 
l'avoir fait, bien sûr ! Tout les modèles à fort saut de viscosité 
induisent des "avalanches", parce que du coup le manteau inf est très 
difficile à pénétrer, il faut des grossses masses pour arrriver à 
traverser cette limite. En un sens l'argument est donc un peu circulaire, 
ou plus précisément, on ne voit que ce qu'on veut voir (si on veut voir 
des avalanches, on met un saut de viscosité important).

La question est, bien sûr, celle de la pertinence des paramètres choisis 
(saut de viscosité ou pas?); voire, dans une certaine mesure, du choix de 
ce qu'on veut modéliser. Modéliser un saut de viscosité à 670 km, c'est 
très bien; mais d'une certaine façon, ça veut dire qu'on a délibérément 
choisi de ne pas modéliser d'autres paramètres, parce qu'on les pense 
moins importants (et/ou que le code deviendrait ingérable, le temps de 
calcul prohibitif, etc.). Il y a une dimension subjective là-dedans. Une 
partie des progrès successifs dans le domaine de la modélisation du 
manteau vient de gens qui essayent de pondre des modèles étudiant l'effet 
de tel ou tel paramètre, qu'on n'avait pas regardé avant. Par exemple, les 
modèles de Machetel ne prenaient pas en compte, je crois, l'existence de 
plaques (au point de vue mécanique, c'est à dire des zones rigides et 
planes). D'autres modèles mettent explicitement des plaques dans leur 
modèle. Un autre paramètre qui est ou non regardé, c'est chauffage interne 
vs. gradient de température imposé de l'extérieur (dans le premier cas ça 
complique le code...).

Ce qui veut dire qu'il ne faut pas forcément prendre les modèles (ceux de 
Machetel comme les dizaines d'autres en existence) comme visant à donner 
une image précise de la convection; leur rôle est plutôt de montrer le 
rôle d'un paramètre ou d'un autre, idéalement sans dénaturer la réalité, 
mais quand même au risque de caricaturer un petit peu le reste.

D'un autre coté, il y a des constantes -- cellules irrégulières, 
avalanches et proéminence des zones froides. Rétrospectivement, une partie 
de tout ça était prédictible (la partie "instabilité de la convection", 
dans le temps comme dans l'espace), au vu du nombre de Rayleigh très 
élevé. Je développe un peu ce point pour éviter des redites plus bas :

(Je crois que c'est bien discuté dans "The innaccessible Earth" de Brown & 
Musett, je ne l'ai pas sous la main pour vérifier (et en plus ça change de 
page selon les éditions !). Il y a aussi des choses dans "La Physique et 
la Terre" de Nataf (chap. 5), que je t'engage vivement à lire si ce n'est 
déjà fait !)

Tout les modèles "modernes" prédisent des convections avec des cellules 
polygonales (en plan), avec des zones de convergence (descente) nettes et 
linéaires et des remontées ponctuelles au coeur des cellules, et peu de 
stabilité dans le temps. C'était prédictible, dans la mesure où le calcul 
de nombre de Rayleigh le plus bateau donne des valeurs très élevées (de 
l'ordre de 10^6, selon les hypothèses de calcul); or pour ces valeurs, 
très loin au dessus du seuil, la convection n'est pas de type Bénard. En 
fait on le voit même chez soi : quand on se fait cuire une soupe aux 
nouilles (les nouilles, c'est pour voir les mouvements :-) ), pour peu que 
la casserole soit large et pas très haute, on met en place ce genre de 
convection -- avec des Ra même pas très élevés, de l'ordre de 10^4 je 
crois. Les modèles reproduisent à peu près tous ça.

Les zones froides apparaissent comme les éléments les plus importants. 
C'est ce que nous montre une l'exemple de la casserole (dès que Ra est 
assez élevé, on a une localisation bien plus forte des zones froides que 
des chaudes). C'est d'autant plus vrai qu'on injecte dans le modèle deux 
paramètres : le chauffage interne (par opposition à un gradient de 
température imposé); et l'existence de plaques rigides en surface.

Avec un chauffage interne, on passe de remontées sous forme de panaches 
localisés au coeur de cellules polygonales, à des remontées plus diffuses, 
épisodiques, mal localisées. Du même coup, on passe d'une convection 
stable (les cellules ne bougent pas) à une convection instable, où les 
cellules changent de place, et où en fait on n'a plus de cellules 
régulières mais des paquets chauds et des paquets froids plus ou moins 
mélangés.

Des plaques rigides ont un effet un peu contradictoire : elles 
affaiblissent encore le rôle des remontées chaudes (qui sont de plus en 
plus diffuses, ponctuelles et irégulières), mais elles localisent très 
fortement les zones de descente (une fois qu'on en initie une, elle a 
beaucoup de mal à bouger). Par ailleurs, elles ont tendance à augmenter la 
taille des cellules -- compare par exemple l'image de couverture de "La 
Physique & la Terre" avec une carte des limites de plaques !

Un autre point commun aux modèles, c'est le rôle de la discontinuité à 670 
km. En mettant un saut important de viscosité, on crée une barière 
mécanique difficile à franchir. La traversée (de haut en bas en tout cas) 
est donc intermittente, avec des passages "en masse" (avalanches) 
occasionels séparés par des périodes où la convection est découplée entre 
les deux étages. Ce résultat est un effet du saut de viscosité -- si on 
l'enlève du modèle, plus d'avlanches.

Un point intéressant, c'est que aucun des modèles (à ma connaissance) ne 
reproduit tout ça ni même n'essaye de le faire. Différents modèles testent 
différents composants pour en voir l'influence, et il ne faut pas essayer 
de leur faire dire plus que ça !

> 1: s'il y a avalanches et intermittance (dans la "plongee", et donc la 
> subduction), par conservation cette intermittance devrait aussi se lire 
> dans l'activité des dorsales, j'imagine. Est-ce qu'on la constate ?

Non, pas que je sache. En fait il faut probablement voir la convection "à 
un étage et demi" de la façon suivante (au moins à visée pédagogique, je 
ne garantis pas la pertinence de la description en dehors de ce contexte) 
: deux cycles plus ou moins permanents, un dans le manteau sup et un dans 
le manteau inf; et un cycle intermittent reliant les deux.

Le cycle stable du manteau sup implique les subductions (la plupart ne 
descendant pas en dessous de 670 km) et les dorsales, qui n'appariassent 
pas comme des objets profondéments ancrés (d'ailleurs, la tomographie ne 
leur montre aucun enracinement profond, contrairement aux subductions). 
C'est probablement du drainage sur une grande échelle, mais relativement 
diffus, de matière. Il se compense par l'accumulation de matière subductée 
sur la discontinuité des 670 km.

Le cylce épisodique couple des avalanches froides et des épisodes de 
"plumes" importants. La manifestation de ces épisodes de type "plume" -- 
qui viennent du manteau profond, et sont donc indépendants du système des 
plaques --, ce serait plutôt des "large igneous provinces" ("flood 
basalts") type Deccan, Columbia River ou Ontong Java.

> (j'avais l'impression que l'activité des dorsales -creation de surface 
> de plaque oceanique- etait relativement constante dans le temps)

Plus ou moins.. Avec quand même des périodes de création plus importante 
lors des phases de rupture des super-continents, mais ça a à faire avec 
les processus manteau sup/lithosphère -- quoi que les ruptures de 
supercontinents peuvent être aidées par des essaims de panaches, dit-on.

> 2: tout a l'opposé de l'images de rouleaux sages et régulierement 
> répartis a la Benard, on a au contraire une circulation s'etalant a 
> l'echelle du globe: http://ccgm.free.fr/icones/PlateTecto_web.jpg

> - coté "plongee-subduction", tout semble regroupé du meme coté (étendu): 
> on a un noeud-triple en indonésie d'ou partent trois arcs de subduction 
> (vers fidji-NZ, vers tout l'arc pacifique, et vers 
> sumatra-himalaya-persique-mediterraneeEst)

Je pense que c'est un exemple typique où la description induit la réponse 
à ta question, non ? On peut aussi décrire le système de subduction 
mondial comme un gros anneau (autour du Pacifique) avec quelques 
extensions (Eurasie).

> - coté dorsales, tout semble regroupé de l'"autre coté" (étendu), en 
> cercle autour de l'antartique, cercle d'ou partent les dorsales 
> atlantique, indienne, pacifiqueCentre.

Là aussi... Tu peux aussi décrire ça comme une sorte de gros tétraèdre 
dont les arêtes seraient les dorsales principales (et ça ferait pas mal de 
sens d'avoir les dorsales à peu près équi-réparties, en terme d'évacuation 
de chaleur, d'ailleurs !).

> comme j'imagine que l'on considere toujours le mouvement des plaques 
> oceaniques comme solidaire du manteau,

Oui mais non... C'est l'exemple typique d'une formulation qui induit ou 
comporte sa propre réponse. Les mouvements des plaques ne sont ps 
"solidaires" de la convection, ni ne sont "une manifestation" ou "un 
effet" de la convection : ils en sont une branche. Les subductions sont 
les branches froides de la convection.

> cela suppose des echelles spatiale de rouleau convectif extremement 
> larges, non ?

Autre "erreur" sémantique : dès lors que tu parles de "rouleau" ou même de 
"cellule" de convection, tu te places implicitement dans un cadre où tu as 
une convection stable dans l'esapce et dans le temps, et avec des 
composants à la géométrie homogène (et constante). Or, justement, un des 
résulats de la modélisation est que ce n'est pas le cas...

> (Oui reconstruisès-je mal a un endroit ?)

Eh bien, outre les imprécisions sémantiques ? :-)
(C'est ce qu'un collègue qualifiait de "pollution scientifique" -- quand 
tu utilises un mot ou une analogie pour expliquer les choses qui, si elle 
n'est pas en elle-même fausse, induit des images ou des idées qui elles le 
sont)

Le problème est que tu essayes de considérer le système plaques comme 
passif, comme des radeaux qui flottent au gré des courants. Or, justement 
ce n'est pas le cas : les plaques (et les slabs plongeants en paticulier) 
sont des composants du système de convection mantellique. La forme du 
système de convection est influencée par la disposition des plaques, tout 
autant que l'inverse. En l'occurence ta question peut se retourner ou se 
reformuler : "les plaques sont arrangées autour d'un hémisphère destrictif 
(la ceinture péri-Pacifique) et d'un hémisphère constructif 
(l'Atlantique); ceci est un effet du cycle des supercontinents, etc. Et en 
conséquence, le système convectif supérieur a une forme contrainte par ce 
dispositif".

> 3: il me semble que le "modele standard" actuel met le "moteur" dans la 
> plongee des vielles surfaces oceaniques, tirant tout le reste ? Dès lors

Oui, aux mêmes réserves d'interprétation (ie, ce n'est pas un système 
séparé du reste, c'est la branche descendante de la convection superieure)

> - comment le mouvement des plaques oceaniques reste-t-il aussi "solide" 
> (i.e. homogene), typiquement dans le pacifique, alors que ca plonge de 
> tous cotés (arc) ?
> (solide au sens mecanique: deplacement monobloc "parallele", i.e. 
> homogene en direction/intensité.)

Hmm, il me faudrait un dessin... Sans trop réfléchir, je diais que ça ne 
plonge pas vraiment de tout coté, d'une part (le Pacifique Ouest ne plonge 
que sur sa bordure Ouest, et avec des directions globalement parallèles). 
D'autre part que toutes les subductions ne sont pas forcément des 
subductions anciennes, profondes et lourdes; tu peux avoir des subductions 
"jeunes" ("subductions forcées"); il y a même des endroits (Sud-Chili) où 
on voit plonger la dorsale ! Il faudrait reprendre ton argument en ne te 
basant que sur les subductions anciennes (avec un slab assez long pour 
avoir un effet).

> - les dorsales correspondent purement aux lieux de déchirures, ou bien a 
> des remontees (fusse par simple conservation d'ou rouleau de convection)

Les deux mon Général ! On oppose maintenant des dorsales "passives" (type 
Atlantique), qui résultent principalement de l'accomodation de la 
divergence; et des dorsales actives, où des remontées mantelliques et des 
productions de magmas importantes sont un des moteurs de la dynamique de 
la dorsale. Regarde ce que fait Y. Lagabrielle -- il a écrit un bouquin je 
crois (ou un chapitre dans Juteau et Maury ? Je sais plus...) où tu 
trouveas ça, et il me semble qu'il y a qq temps j'avois trouvé un de ses 
powerpoints de cours, dont j'avais d'ailleurs repris des morceaux dans par 
exemple
http://academic.sun.ac.za/geology/undergraduate/G314/2006/G314-06-W10...

> ?
>    - si ce sont de simple dechirures, pourquoi restent-elles aussi 
> coherentes (quasi ligne),

Parce que mécaniquement la déformation se localise systèmatiquement -- le 
coût énergétique est bien moindre. De plus, tu as un feedback positif, à 
partir du moment où tu localises la déchirure l'activité thermique 
+ magmatique affaiblit la lithosphère, ce qui localise fortement toute 
déformation suivante.

> et pourquoi coincident-elle a des anomalies macroscopiques 
> (gravité,temperature, magnétisme) ?

Parce que ce sont des déchirures à l'échelle de la lithosphère, pour 
commencer; et que pour "combler" ce trou, il faut draîner du manteau à 
assez grande distance, d'où flux de matière, chaleur plus élevée, etc.

De plus, les anomalies que tu mentionne sont des effets essentiellement de 
surface : anomalie de chaleur liée à l présence de magmas + à une 
lithosphère mince; anomalie gravi due à une lithosphère mince; anomalie 
magnétique principalement enregistrée par les basaltes de la croûte 
océanique, donc par des roduits volcaniques de cette extension.

>    - si ce sont des sites de remontés, comment expliquer de tels 
> décrochements le long des dorsales (i.e. ils restent fonctionnels: bien 
> que des morceaux de dorsales soient tres decrochés, ils restent 
> normalement actifs).

Les décrochement sont là pour accomoder des différences de vitesse le long 
de la dorsale. N'oublie pas que ça se passe sur une sphère; donc les 
mouvements sont des rotations autour d'un pôle (eulérien), si bien que 
près du pôle la vitesse est nulle, plus loin la vitesse est plus forte, 
etc.

>    - ou bien il y a une "zone diffuse de remontee", laissant le loisir 
> aux dechirures de se disperser un peu, les propriétés mécaniques des 
> plaques assurant un localement un mouvement "solide homogene" meme si le 
> rouleau mantelique dessous ne l'est pas autant ?

Je suis pas sûr de comprendre ce que tu veux dire, mais à vue de nez je 
répondrais "euh... oui".

> sinon, a ces decrochements de segments de dorsales correspondent des 
> failles dans la direction normale, et le fond oceanique semble tapissé 
> de ces failles extremement longues et paralleles.

Oui, les "transform zones" sont des failles -- forcément.

> Connait-on le mecanisme (et l'activité) de ces failles ?

Bien sûr, failles transformantes avec les mécanismes aux foyers qui vont 
bien. Voir Juteau-Maury je pense.

> est-ce juste la memoire de l'emission de matiere le long de dorsales a 
> decrochement, ou est-ce qu'elles jouent et qu'il y a de leger mouvement 
> relatifs entre ces "bandes de plancher" normales aux dorsales ?

?? Comprends pas ?

Désolé, j'ai été un peu bref sur la fin, j'ai plus le temps.... J'espère 
que ce que j'ai écrit au début te permettra de répondre à une partie de 
tes questions par toi même ? Sinon sur les dorsales, essaie Nicolas ("Les 
montagnes sous la mer"), Juteau et Maury, ou Lagabrielle; dans le ppt 
donné en lien tu devrais aussi trouver quelques réponses à tes questions.

JF


« Modifié: mars 02, 2009, 02:30:01 par Jacques »
La science se distingue des autres modes de transmission des connaissances, par une croyance de base : nous croyons que les experts sont faillibles, que les connaissances transmises peuvent contenir toutes sortes de fables et d’erreurs, et qu’il faut prendre la peine de vérifier, par des expériences

Jacques

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Re : Recueil des autres interventions de JF Moyen sur les subductions.
« Réponse #7 le: mars 02, 2009, 01:58:34 »
5 mars 2008 :
Citation de: Jean-François Moyen
You're welcome, de temps en temps ça aide à se clarifier les idées d'écire 
ce genre de choses... Ca force à poser un peu les bases.

> Jean-François Moyen a écrit :
>> Remarque préliminaire : l'essentiel des reflexions sur la convection 
>> (avalanches en particulier) repose sur des modèles numériques, 
>> puisqu'on n'a évidemment pas le recul temporel nécessaire pour des 
>> observations directes de ce genre de phénomènes. Les seules 
>> observations qu'on puisse faire sont celles basées, par exemple, sur la 
>> répartition des masses dans le manteau

> ce qui m'interpelait dans les avalanches etait qu'a voir l'animation, on 
> avait l'impression que ca devait avoir un gros impact sur la surface, 
> via une "aspiration" massive que j'imaginais devoir accelerer et etendre 
> la subduction a la surface (par ex je me demandais si la fameuse zone 
> des Philippines n'en n'etait pas une trace).

Il faut bien voir qu'on rentre dans l'hyper-spéculatif, là. Tu es en train 
d'essayer de faire le lien entre des simulations relativement abstraites, 
sans doute non-dimensionnées, et des observations géologiques directes. 
C'est pas simple, d'autant que si la convection du manteau est instable et 
épisodique (je ne sais pas si c'est "chaotique" au sens physique du 
terme), ce n'est pas parce qu'on observe une avalanche à un moment T dans 
la simulation qu'elle existera au même T dans la nature, tout ce qu'on 
peut tirer de la simulation c'est des choses comme "il y a des avalanches 
avec une péridicité de t' ". (tu le sais mieux que moi, je clarifie pour 
les lurkers !).

Mais sinon, il y a des gens qui ont essayé de faire le lien entre cycles 
des supercontinents (Wilson) et avalanches (tu peux me citer là-dessus, 
c'est la dernière page de ma thèse :-), plus sérieusement je crois que ça 
doit se trouver dans des papiers de Condie -- tiens, j'ai une ref à Condie 
1998, Earth.Plan.Sci.Lett. 163:97--108 "Episodic continental growth and 
supercontinents: a mantle avalnache connction?"). La logique, c'est bien 
sûr que les deux ont la même périodicité (200-300 Ma en gros); et que 
comme tu le dis, une avalanche par effet d'aspiration pourait contribuer à 
regrouper les continents en une masse unique (supercontinent Wilsonien). 
En effet, une phase de regroupement se traduit par une accélération des 
subductions. Mais le dernier supercontinent est la Pangée à 250 Ma, les 
traces de ce regoupement sont donc largement perdues (ce sont les arcs et 
collisions qui constituent le cycle Hercynien, en fait, et ses équivalents 
en Asie du Sud etc).

(addendum -- je viens de trouver ça en googlant pour trouver une autre ref
http://www.nature.com/nature/journal/v332/n6166/abs/332695a0.html
"Large-scale mantle convection and the aggregation and dispersal of 
supercontinents"
c'est du 1988, donc un peu vieux, c'est avant les avalanches...)

> En fait quel est l'etat le plus moderne des images tomographiques 
> profondes ? On n'a pas encore la carte 3D de tout le manteau a 
> resolution differente pour caracteriser les differentes structure et 
> ainsi valider ou falsifier les modeles ?

Ben, on a divers problèmes. Un de résolution (proportionelle à longueur 
d'onde, mais pénétration anto-proportionelle à longueur d'onde, ce qui 
réduit pas mal la résolution en profondeur). Un de modèle de référence 
(pour faire de la tomo, il faut un modèle de référence, ce qu'on visualise 
sont les écarts au modèle !). Et un d'interprétation, puisqu'un écart au 
modèle peut être aussi bien une zone chaude/froide ou une zone 
chimiquement différente.

Je me souviens d'un papier significatif des annes 90 (mon pifomètre me dit 
que ca doit être Ricard, Y., Richards, M. A., Lithgow-Bertelloni, C. & Le 
Stunff, Y. A geodynamic model of mantle density heterogeneity. J. Geophys. 
Res. 98, 21895?21909 (1993) ). Il disait que la répartition des masses 
dans le manteau (telles que déduites du géoide) s'explique très simplement 
par la position des slabs subductés dans les derniers 200 ou 300 Ma. En 
même temps l'argument était un peu circulaire, parce qu'il avait besoin de 
contraindre le saut de viscosité à 670 km et il le faisait en voyant ce 
qui donnait un meilleur fit avec les données... Par contre, je n'ai pas 
regardé le papier sous l'angle "avalanches", c'était avant les modèles à 
avalanches justement. Je ne sais pas si des gens ont repris l'affaire... 
un petite recherche "cited by" chez Web of Science pourrait aider !

>> Tout les modèles à fort saut de viscosité induisent des "avalanches", 
>> parce que du coup le manteau inf est très difficile à pénétrer, il faut 
>> des grossses masses pour arrriver à traverser cette limite.

> oui, j'ai lu des choses. avec la grosse difficulté de la transformation 
> minéralogique entrainant changement de densité, a l'effet ausi 
> crucialement clé que compliqué a modeliser et quantifier (grosse 
> sensibilité aux para).

'xactement. Je ne sais pas où ça en est maintenant (j'ai un peu arrêté de 
faire de la biblio généraliste depuis que je fais vraiment de la 
recherche, c'est grave docteur ? :-) )

>> Tout les modèles "modernes" prédisent des convections avec des cellules 
>> polygonales (en plan), avec des zones de convergence (descente) nettes 
>> et linéaires et des remontées ponctuelles au coeur des cellules, et peu 
>> de stabilité dans le temps. C'était prédictible

> Donc meme loin du tres sage cas Benardien, on a bien cellules 
> polygonales, frontieres lineaires nettes ?

> Du coup je ne comprend pas bien pourquoi tu trouves innapproprié de 
> parler de cellules, ou de rouleau ?

"Rouleau" : parce que ça a une forme allongée à section circulaire, un 
rouleau, très différent d'une cellule polygonale.

"Cellule" : je pense en effet que j'exagère un peu. Mais pour un public 
non-physicien (qui est le mien en général, i.e. profs du secondaire, 
lecteurs de fsg et étudiants undergrad en géologie), "cellule" a la 
connoation d'un objet stable dans le temps. Ce qui n'est pas le cas, 
apparement. Je préfère donc éviter complètement le vocable.

>> élevées (de l'ordre de 10^6, selon les hypothèses de calcul); or pour 
>> ces valeurs, très loin au dessus du seuil, la convection n'est pas de 
>> type Bénard.

> de toutes facon ici on a aussi du chauffage dans le volume (ou bien ca 
> represente une energie vraiment au second ordre par rapport au gradient 
> general ?),

C'est loin d'être du second ordre, 60 ou 80% de la chaleur terrestre est 
de la production dans le manteau, pour 10-15 % d'origine profonde 
(cristallisation de la graine et refoidissement général).

> Par ailleurs il me semble que la rhéologie du manteau est assez non 
> linéaire, non ? C'est un fluide tres non-newtonien ? j'imagine ca doit 
> aussi impacter l'application de la caracterisation Benardienne ?

Je suppose que oui, mais tu t'y conais manifestement mieux en méca flu que 
moi...

>> En fait on le voit même chez soi : quand on se fait cuire une soupe aux 
>> nouilles (les nouilles, c'est pour voir les mouvements :-) ), pour peu 
>> que la casserole soit large et pas très haute, on met en place ce genre 
>> de convection -- avec des Ra même pas très élevés, de l'ordre de 10^4 
>> je crois. Les modèles reproduisent à peu près tous ça.
(...)
> Cela dit ca pose probleme dans le paragraphe ci dessus puisque justement 
> selon la force du chauffage tu peux avoir des Ra tres differents avec 
> circulation soit en cellules soit tres turbulentes.
> Mais je n'imagine quand meme pas le manteau turbulent ?

Euh, je suis en train de feuilleter le Nataf-Sommeria ("La physique et la 
Terre", je te le recommande); ils parlent en effer de nb de Reynolds de 
10^-20 et disent que "la turbulence hydrodynamique est absente". Si ça 
réponds à ta question. Mais c'est à ton tour de me briefer un peu sur 
laminaire vs. turbulent, chaotique, etc., j'ai besoin qu'on me 
rafraichisse la mémoire.

> Cela dit meme la turbulence n'exclue pas l'organisation: par ex les 
> mamelons de cumulonimbus ou de fumee convective ou d'avalanches de 
> poudreuse (c'est mes applis a moi) ont cett organisation (impactant 
> forme et circulation a leur echelle) et donneraient presque envie de 
> parler localement de cellules ou de rouleaux (ne serait-ce qu'en 
> regardant la vorticité). Idem quand une "tete de plume" devient un 
> anneau de vorticité autonome.
> Cependant il reste quand meme une difference: dans les cas que je cite 
> ici, le moteur n'est plus Benardien, i.e. uniquement du au gradient 
> thermique: car une fois cree, la vorticité devient le moteur (elle a une 
> inertie et persistance impressionnante). Au pire, les 2 effets se 
> combinent. Plus tous les patterns purement du aux instabilités 
> dynamiques (e.g. Kelvin-Helmholtz).

Dans le cas du manteau, il parait que les effes interiels sont en effet 
négligeables.

>> Les zones froides apparaissent comme les éléments les plus importants. 
>> C'est ce que nous montre une l'exemple de la casserole (dès que Ra est 
>> assez élevé, on a une localisation bien plus forte des zones froides 
>> que des chaudes)

> Dans une couche meteo presentant des cellules Benardiennes on a 
> generalement aussi montee au centre et descente aux bords, mais il 
> arrive que ce soit l'inverse et je crois qu'on ne sait pas trop ce qui 
> determine ca.
> Tu as des idees la dessus ?

Aucune, ça semble un phénomène général. Ca a sans doute à voir avec le 
développement d'instabilités, des choses comme ça... Le fait d'être 
chauffé à la base (plutôt que refroidi au sommet) peut il jouer un rôle ?

>> Avec un chauffage interne, on passe de remontées sous forme de panaches 
>> localisés au coeur de cellules polygonales, à des remontées plus 
>> diffuses, épisodiques, mal localisées.

> pourquoi ? ca titille un mode d'instabilité specifique ?

Sais pas. C'est page 90-91 de Nataf & Sommeria, ils s'appuient sur une 
figure qui semble venir d'une des refs ici :

http://portal.acm.org/citation.cfm?id=245705&jmp=indexterms&coll=GUID...

(essaye J.S.Painter, P.Bunge, Y. Livnat. Case Study: Mantle Convection 
Visualization on the Cray t3D IEEE Proceedings Visualization `96, pp. 
409-412, 1996 , ou peut être Bunge & Richards 1996, GRL 23:2987-2990 "The 
origin of large-scale structure in mantle convection (...) " ). Je 
n'arrive pas à trouver la figure... c'est la couverture du bouquin, tu 
peux la voir là : 
http://www.editions-belin.com/csl/page.asp?path=iSci-iSciCro-tSciCro2370

>> Du même coup, on passe d'une convection stable (les cellules ne bougent 
>> pas) à une convection instable, où les cellules changent de place

> J'ai du mal a stabiliser la situation que tu presentes:

s/stabiliser/imaginer/ ?

> dans ce dont tu parles plus haut avec fort Ra, les cellules restaient 
> stables, immobiles et regulieres  ?

Apparement, oui. Nataf & Sommeria citent un (Bercovici et al. 1989 J. 
Fluid. Mech --- c'est pour toi, ça --- 206:75-104) qui montrent qu'un 
système sphérique, à Pr infini, chauffé par la base (gradient imposé) et 
Ra=70 000 forme des cellules stables à lignes froides et points chauds (et 
disposées en tétraèdre, d'ailleurs, pour faire le lien avec des choses 
plus bas). Compare avec le modèle de Bunge qui pour le même Ra, la même 
géométrie, mais un chauffage interne, donne des lignes froides, des 
remontées diffuses (pas de panache montant net), des cellules plus 
petites, plus désordonnées et moins stables.

>> Des plaques rigides ont un effet un peu contradictoire

> on est d'accord que ceci ne concerne que les plaques continentales ?

Non, ce n'est pas la question ici. Ce qui compte c'est la lithosphère, 
dont la croûte ne représente que la partie sup. La lithosphère fait 
100-150 km, dont les 35 (ou 7) km supérieurs sont la croûte. La nature de 
la croûte n'a pas grande importance ici. La lithosphère joue un rôle en 
tant que "peau" à forte viscosité (avec un saut de viscosité de l'ordre, 
je crois, de 10^3--10^4), et que couche-limite conductive au sommet du 
système.

>> Par ailleurs, elles ont tendance à augmenter la taille des cellules -- 
>> compare par exemple l'image de couverture de "La Physique & la Terre" 
>> avec une carte des limites de plaques !

> http://ecx.images-amazon.com/images/I/51S1Y17FQPL._AA240_.jpg

> qu'entends tu par "augmenter" ?

Je veux dire que un modèle sans plaques explicites (ie, sans CLT ni peau 
visqueuse), comme modélisé par Bunge, donne des cellules de taille 
caractéristique de 1000 km, comparé aux plaques dont la largeur typique 
est plus proche de 10 000 km.

Le nom qui me vient à l'esprit pour ce genre de modèles, c'est P. Tackley, 
par exemple "Self-consistent generation of tectonic plates in 
three-dimensional mantle convection", EPSL 157:9--22 (1998). L'astuce est 
d'intoduire une rhéologie avec "strain rate weakening" qui permet de la 
localisation de la déformation, ce qui va concentrer les limites de 
plaques sur quelques zones étroites, et donc favoriser moins de plaques, 
mais plus grandes.

> un couplage conduit vraiment a changer l'echelle de la circulation dans 
> les "cellules" ?

> Ou tu penses juste a un arrangement tres local a l'interface 
> manteau-plaque ?

cf. au dessus. De ce que je comprends, ce qui joue un rôle est la 
possibilité/necessité de localiser la déformation de la "peau" visqueuse 
(i.e., la lithosphère), ce qui réduit le nombre de "spreading centers".

>>> 1: s'il y a avalanches et intermittance (dans la "plongee", et donc la 
>>> subduction), par conservation cette intermittance devrait aussi se 
>>> lire dans l'activité des dorsales, j'imagine. Est-ce qu'on la constate 
>>> ?
>>  Non, pas que je sache. En fait il faut probablement voir la convection 
>> "à un étage et demi" de la façon suivante (au moins à visée 
>> pédagogique, je ne garantis pas la pertinence de la description en 
>> dehors de ce contexte) : deux cycles plus ou moins permanents, un dans 
>> le manteau sup et un dans le manteau inf; et un cycle intermittent 
>> reliant les deux.

> sans que cette immense masse qui coule soudain n'ait d'effet 
> d'aspiration a la surface si proche ? j'ai du mal a y croire !

Sans doute que si, cf. au dessus.

> Ou bien tu veux dire qu'on peut oublier les avalanches pour comprendre 
> les moteurs "quotidiens" de la subduction ?

C'est en partie ça. Il y a une activité de subdution de "background", en 
dehors de toute avalanche.

>> Le cylce épisodique couple des avalanches froides et des épisodes de 
>> "plumes" importants. La manifestation de ces épisodes de type "plume" 
>> -- qui viennent du manteau profond, et sont donc indépendants du 
>> système des plaques --, ce serait plutôt des "large igneous provinces" 
>> ("flood basalts") type Deccan, Columbia River ou Ontong Java.

> J'avais un autre questionnement a ce sujet:
> le volume des traps, pour impressionnant qu'il soit localement, semble 
> quand meme globalement assez faible pour etre la contrepartie 
> essentielle des descentes (ici, avalanches). Ou bien est-ce l'echelle de 
> temps qui compense ? (avalanche massive mais lente, tandis que les 
> epanchements de trapps seraient finalement frequents ?)

Bonne question. Mais attention, il faut voir que les trapps ne sont que la 
manifestation de surface de la remontée du manteau. Les trapps, ce sont 
des basaltes -- des magmas formés par fusion du manteau péridotitique. Le 
matériel qui remonte n'est *pas* basaltique. Pour faire du basalte, il 
faut faire fondre le manteau à un taux de 10--20 %, tu as donc un ordre de 
grandeur de plus, pratiquement, en termes de volume. Ce qui ne règle 
probablement pas ton problème...

Je pense que dans les modèles à avalanche, il y a un flux en retour 
diffus, non localisé, qui est quasiment invisible... Il faudrait regarder 
les champs de vélocité en détail !

>>> (j'avais l'impression que l'activité des dorsales -creation de surface 
>>> de plaque oceanique- etait relativement constante dans le temps)
>>  Plus ou moins.. Avec quand même des périodes de création plus 
>> importante lors des phases de rupture des super-continents, mais ça a à 
>> faire avec les processus manteau sup/lithosphère -- quoi que les 
>> ruptures de supercontinents peuvent être aidées par des essaims de 
>> panaches, dit-on.

> j'avais compris que quand une proto-dorsale restait coincee sous un 
> continent, on avait une progressive montee en temperature, d'ou au final 
> perçage puis debuts suractifs.

Oui et non, dis comme ça tu suppose que les dorsales sont des objets 
stables et présents "de toute éternité", alors que en général c'est sans 
doute le contraire (ce sont des réactions passives à l'extension, en 
majorité). Mais sinon oui, tu as accumulation de chaleur sous les 
continents isolants, qui conduit à un affaiblissement de la lithosphère et 
permet de localiser la rupture.

>>> - coté "plongee-subduction", tout semble regroupé du meme coté 
>>> (étendu): on a un noeud-triple en indonésie d'ou partent trois arcs de 
>>> subduction (vers fidji-NZ, vers tout l'arc pacifique, et vers 
>>> sumatra-himalaya-persique-mediterraneeEst)
>>  Je pense que c'est un exemple typique où la description induit la 
>> réponse à ta question, non ? On peut aussi décrire le système de 
>> subduction mondial comme un gros anneau (autour du Pacifique) avec 
>> quelques extensions (Eurasie).

> je voulais dire qu'on a l'impression qu'il existe un angle de vue de la 
> Terre ou il y a en moyenne dominance des dorsales et de l'expansion, et 
> un autre angle de vue ou il y a en moyenne dominance de la subduction, 
> laissant entendre une circulation a echelle de la planete (et pas juste 
> equilibree a l'echelle de qq milliers de km).
> Je vois mal ?

Je dirais que tu as un hémisphère continental et un hémisphère océanique, 
ce qui revient au même. Oui, c'est possible qu'il y ait en effet une 
dissymétrie globale.

>> Oui mais non... C'est l'exemple typique d'une formulation qui induit ou 
>> comporte sa propre réponse. Les mouvements des plaques ne sont ps 
>> "solidaires" de la convection, ni ne sont "une manifestation" ou "un 
>> effet" de la convection : ils en sont une branche. Les subductions sont 
>> les branches froides de la convection.

> c'etait une branche de ma question :-)
> Tu veux dire que les plaques (oceaniques) sont juste la peau du manteau 
> ? i.e. aucune rigidité de croute océanique capable de se désolidariser 
> (du moins shear sous croute) ou de modifier la circulation ?

Ben, si, bien sûr... C'est ce qui les rend difficile à décrire. C'est à la 
fois une peau solidaire, ET un objet qui peut se désolidariser à la base 
et glisser. Il y a des évidences géologiques de shear à la base des 
plaques. Sans être spécialiste de modélisation, je dirais que ça rend les 
modèles très dificiles à construire. Le modèle de Tackley me semble les 
décrire comme une peau (déchirable), c'est un des extrêmes. Mais on peut 
aussi faire des modèles où ce sont des objets indépendants, je n'ai pas 
d'exemples sous la main.

Simplification pour simplification, ceci dit, quand on discute de 
convection du manteau je préfère insister sur l'aspect "peau". Il n'est 
sans doute pas plus "vrai", mais il est plus producif (comme cadre 
conceptuel).

>> Autre "erreur" sémantique : dès lors que tu parles de "rouleau" ou même 
>> de "cellule" de convection, tu te places implicitement dans un cadre où 
>> tu as une convection stable dans l'esapce et dans le temps, et avec des 
>> composants à la géométrie homogène (et constante). Or, justement, un 
>> des résulats de la modélisation est que ce n'est pas le cas...

> cf plus haut: je pense que tant qu'on n'est pas en plein chaos 
> turbulent, du moins dans le cadre des patterns que tu decris, on peut 
> sans trop de probleme continuer a parler de convection et de cellules, 
> du moment qu'on a conscience qu'il ne s'agit pas du sage cas d'Ecole 
> Banardien.

C'est pour ça que j'évite le terme de "cellule" complètement, mais sinon 
d'accord, on parle de la même chose.

>> paticulier) sont des composants du système de convection mantellique. 
>> La forme du système de convection est influencée par la disposition des 
>> plaques, tout autant que l'inverse.

> cette fois tu ne parles bien que des plaques continentales ?

Idem que plus haut, c'est l'aspect plaque (lithosphère) qui est important 
ici.

> disons que ca ne m'est pas intuitif a cause des fluides que je connais.
> Ici, la viscosité ou la rhéologie seraient telles que la circulation ne 
> peut pas se desolidariser des plaques continentales ? (dans de l'eau tu 
> aurais juste un shear localisé dans une mince couche limite sous la 
> plaque).

Les deux, en un sens. Disons, si tu veux, que les modèles que je connais 
sont très "manteau-centriques" et que du coup ils considèrent les plaques 
comme une peau. Il y a sans doute des modèles à découplage, mais je ne les 
ai pas vu passer ! Google est mon ami, je sais.

(j'arrête là, on change de thème plus bas et on pase à des questions 
d'ordre plus géodynamiques sur lesquelles je reviendras, time permitting).

JF

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La science se distingue des autres modes de transmission des connaissances, par une croyance de base : nous croyons que les experts sont faillibles, que les connaissances transmises peuvent contenir toutes sortes de fables et d’erreurs, et qu’il faut prendre la peine de vérifier, par des expériences