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Auteur Sujet: Les entourloupes de Staune provoquent l'agacement de Vincent Fleury :  (Lu 6740 fois)

Jacques

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Lien : http://www.lemonde.fr/opinions/article/2010/01/29/darwin-et-avatar-une-reponse-a-jean-staune-jean-baptiste-andre-et-nicolas-baumard-par-vincent-fleury_1298685_3232.html
ou http://www.lemonde.fr/web/imprimer_element/0,40-0@2-3232,50-1298685,0.html

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Darwin et "Avatar" : une réponse à Jean Staune, Jean-Baptiste André et Nicolas Baumard, par Vincent Fleury
LEMONDE.FR | 29.01.10 | 17h55

Mon nom apparaît dans deux articles récents publiés dans votre journal (Le Monde), papier et en ligne. Dans le premier, M. Jean Staune, essayiste chrétien, exploite mes travaux scientifiques afin de défendre l'opinion que le darwinisme serait à revoir, et qu'il existerait une mouvance structuraliste fondamentalement anti-darwinienne. Derrière ces propos, on devine une obédience spiritualiste.

Dans une réponse à cette tribune, MM. André et Baumard répliquent à M. Staune que la synthèse néo-darwinienne est si puissante qu'elle explique également toutes ressemblances pouvant exister entre les formes animales observées. Ces ressemblances entre "espèces indépendantes" ne sauraient selon eux renforcer des théories anti-darwiniennes. Ces auteurs terminent par cette formule : "Non, les théories anti-darwiniennes défendues par Jean Staune, Vincent Fleury, et les membres de l'Université Interdisciplinaire de Paris, ne sont pas, pas un seul instant, renforcées par la ressemblance entre espèces indépendantes, pas plus sur Pandora que sur Terre". Ces propos amalgament ma personne et mes travaux avec M. Jean Staune, et au-delà avec la mouvance spiritualiste, peut-être même dans l'esprit de MM André et Baumard, avec l'Intelligent Design.

Je tiens à faire la mise au point suivante. Je ne suis pas membre de l'Université Interdisciplinaire de Paris, M. Jean Staune n'est pas chercheur, et ne peut donc être co-auteur de théories avec moi-même ; je ne suis pas anti-darwinien, et pas davantage créationniste. Chercheur au CNRS, j'ai depuis de longues années développé une théorie physique de la morphogenèse animale qui contribue à éclairer la nature des contraintes auxquelles la morphologie des animaux est soumise.

Cette théorie fait entrer en embryologie, et au-delà, dans la pensée de l'évolution, les propriétés matérielles de la matière vivante, en particulier sa fluidité. La matière vivante, obéissant aux lois de l'hydrodynamique, serait contrainte par un ensemble de lois très communes en mécanique (conservation de la masse, équilibre visco-élastique, conditions aux limites des champs de vecteurs, etc.). La prise en compte de ces notions éclaire la morphogenèse embryonnaire, et explique très simplement les grandes lignes de la formation d'un animal. Cette théorie ne contrevient pas au darwinisme stricto sensu.

Cependant, il est notoire que le darwinisme ne traite que de l'avantage sélectif des animaux, mais non de l'espace des formes possibles sur lesquelles la sélection agit. De même, et contrairement à une idée répandue, la génétique du XXe siècle n'a pas apporté d'explication ultime aux formes observées, les forces physiques mises en jeu au cours du développement ayant été négligées. Depuis quelques années une avalanche de travaux [E. A. Zamir, B. J. Rongish, and C. D. Little, PLoS Biol. 6, e247 (2008), M. Chuai and C. Weijer, HFSP, J 3 (2), 71, (2009), Pouille PA, Ahmadi P, Brunet AC, Farge E. Science Signaling, 14, 2(66) (2009)] vient confirmer que la physique joue un rôle primordial dans l'établissement des formes du vivant.

J'ai moi-même contribué, notamment en montrant comment des mouvements de vortex très simples mettaient en forme le petit embryon de vertébré tétrapode (Vincent Fleury, Organogenesis, 2,1, 2005, et European Physics Journal Appl. Phys. 45 30101, 2009). Une extrapolation simple de ces idées permet d'entrevoir une explication de l'origine des animaux, y compris de l'homme, dans la dynamique auto-organisée ("émergente") des collisions d'anneaux tourbillons hyperboliques, cette dynamique étant découplée de la génétique : les gènes en quelque sorte, appuient avec la pédale darwinienne sur le moteur du mouvement qui est, lui, contraint par les lois de la physique.

Ces propos peuvent sembler ridicules aux non-spécialistes. Ce qui est ridicule, c'est que la presse ne parvienne à traiter des progrès les plus récents et les plus novateurs en physique de la morphogenèse, dont je ne suis qu'un représentant parmi beaucoup d'autres (E. Farge Institut Curie, Y. Couder Univ. Paris-Diderot, P. Pelcé, Univ. de Marseille, D. Gordon U. de Manitoba, T. Newman, Arizona State University, G. Forgacs Univ. of Missouri, K. Weijer Univ. Dundee, etc., mon tort étant sans doute de questionner l'évolution), qu'à travers le prisme d'une grosse production américaine, vaguement commentée par un polémiste chrétien, lui-même repris par d'autres qui semblent ne strictement rien connaître, ni de mes travaux, ni de ma personne, ni de tous les autres.

Vincent Fleury est chargé de Recherches au CNRS, Laboratoire Matière et Systèmes Complexes, Université Paris Diderot. Derniers ouvrages parus "La Chose humaine, la physique des origines", Vuibert 2009.

Il est intéressant de joindre au dossier de Staune, ses deux interventions.
L'une en réponse à Fleury, qui vaut son pesant de guano frais :
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JEAN STAUNE
29.01.10 | 19h56

La mise en cause de Fleury par André et Baumard montre le niveau de dogmatisme qu'a atteint le darwinisme aujourd'hui. Toute tentative de chercher ailleurs que dans les facteurs darwiniens les mécanismes clés de l'évolution est considéré comme un crime. Il y a là un vrai " obscurantisme scientifique". Ma position est NON darwinienne, pas ANTI. Je ne suis pas un "polémiste chrétien" mais un chargé de cours à l'EPFL. Le fait d'être chrétien dévalorise il les travaux d'une personne ?

C'est quand même rigolo que celui qui le 6 juillet 2009 hurlait sa haine et son triomphe, parce que son petit roi préféré porte des coups et encore des coups et encore des coups contre la laïcité, à présent s'indigne et se prétend victime du "dogmatisme des darwiniens". A son habitude, il traite collectivement les scientifiques qui lui résistent, de "obscurantistes".

Ajoutons au dossier le foutage de gueule initial, de l'ineffable Staune :
http://www.lemonde.fr/web/imprimer_element/0,40-0@2-3232,50-1295072,0.html

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Volontairement ou non Avatar nous introduit à une nouvelle conception de la théorie de l'évolution
Le non-darwinisme visionnaire de James Cameron, par Jean Staune
LEMONDE.FR | 21.01.10 | 17h34  •  Mis à jour le 21.01.10 | 17h37

Les grands films de science-fiction permettent souvent d'aborder de façon ludique des questions scientifiques ou philosophiques.

Avatar ne fait pas exception à la règle en nous incitant à nous interroger si, sur une planète ou régnerait des conditions proches de la terre, l'évolution se déroulerait de façon relativement identique ou de façon tout à fait différente à celle ayant conduit jusqu'à nous.

L'article de Thomas Heams (lire Le Monde des 17 et 18 janvier) repose sur la position darwinienne standard. Chaque trajectoire menant de l'ancêtre commun aux différents êtres vivants existant actuellement sur terre n'a été possible que grâce à l'accumulation d'un très grand nombre d'événements contingents, ce qui amène à penser que la probabilité de revoir la même trajectoire se dérouler, non seulement sur terre mais aussi ailleurs dans l'univers, et arriver au même résultat, est quasiment nulle.

C'est ainsi que Heams reproche (de façon humoristique) à Cameron de laisser penser que les structures des êtres vivants seraient "inéluctables et implacablement reproduites là où la vie réapparaîtrait".

Or c'est justement dans ce sens que se dirige quelques-unes des recherches les plus novatrices dans le domaine de l'évolution ! Ainsi, l'un des plus grands paléontologistes actuels, Simon Conway Morris, titulaire de la chaire de paléontologie de l'université de Cambridge, n'hésite pas à écrire : "Les mammifères et les singes sont apparus par le biais de trajectoires historiques spécifiques, mais dans ces cas (et dans beaucoup d'autres), les convergences variées en direction des mammifères et des singes indiquent que si chaque histoire est nécessairement unique, les formes complexes que l'on trouve au bout de ces processus ne sont pas simplement le résultat d'événements locaux et aléatoires. Sur toute autre planète aux caractéristiques équivalentes, je suggère que nous trouverons des animaux très proches des mammifères, et des mammifères très proches des singes. Non pas identiques, mais similaires, peut-être étonnamment similaires." Il est évident que la contingence et le hasard jouent un rôle dans l'évolution, mais l'idée majeure de cette nouvelle approche réside dans le fait qu'ils sont canalisés de telle façon que l'évolution serait en grande partie reproductible et prédictible.

On affirme parfois nous ne serions pas là si une météorite n'avait pas éliminé les dinosaures, mais dans ce cas, une ère glaciaire aurait fini par survenir, éliminant les grands animaux à sang froid et favorisant des petits animaux à sang chaud, et permettant à des êtres comme nous d'apparaître un jour ou l'autre.

Au-delà de cette idée du hasard canalisé, d'autres mécanismes doivent être envisagés pour expliquer cette disposition de l'évolution à reproduire des schémas identiques en dépit des événements contingents.

A une évolution qui se déroulerait majoritairement par sélection naturelle s'oppose l'idée d'une évolution qui se déroulerait principalement sous l'influence des lois de la nature. C'est ce qui explique que l'évolution pourrait ainsi se reproduire sur des planètes différentes à partir du moment où les conditions physico-chimiques seraient proches.

Il est impossible de savoir quelle hypothèse est la plus crédible tant que nous ne pouvons étudier que des formes de vie issues d'une seule et unique planète. Mais c'est là qu'une série de résultats récents, publiés dans des grandes revues scientifiques telles que Science et Nature, nous fournissent, à défaut de preuves, des éléments en faveur d'une évolution reposant sur les lois naturelles et non sur la seule sélection.

En étudiant d'une part des convergences qui existent sur terre (c'est-à-dire des cas où l'évolution parvient à des résultats identiques par des chemins différents) et d'autre part en montrant que les chemins suivis par l'évolution sont moins nombreux que prévus, ces travaux nous conduisent à des conclusions inimaginables il y a encore cinq ans : le fait qu'il existe seulement un petit nombre de chemins favorables implique que l'évolution peut être plus reproductible que ce que l'on pense généralement et peut être même prédictible.

Ainsi, exactement à l'inverse de ce qu'affirme Thomas Heams, les progrès de la biologie contestent l'idée que l'adaptation et la contingence seraient les facteurs clés de l'évolution.

On pourrait même en ironisant reprocher à Cameron de ne pas avoir été assez loin dans sa remise en cause de la contingence et dans sa défense d'une évolution répétable et prédictible. En effet, les animaux de Pandora ont six membres, alors que si l'on se fie aux travaux de Vincent Fleury (chercheur au CNRS, ndlr), on constate qu'il y a une logique et des contraintes telles à la formation de vertébrés terrestres pourvus de quatre membres, qu'il est tout à fait possible que le schéma tétrapode puisse apparaître sur Pandora et d'autres planètes.

Cette nouvelle conception, intitulée structuralisme, renoue avec les pensées de certains scientifiques qui étaient évolutionnistes tout en étant parfois antérieurs à Darwin, comme Geoffroy Saint-Hilaire.

Stephen Jay Gould, dans un de ses ouvrages, a réhabilité ce courant de pensée qui nous offre une alternative à la fois au darwinisme et à l'"intelligent design".

Ces deux approches, pourtant opposées, ont en commun de considérer les êtres vivants comme des structures contingentes, façonnées par "l'horloger aveugle" de la sélection naturelle pour les darwiniens (voir l'ouvrage de Richard Dawkins portant ce titre) ou par un designer pour l'intelligent design. A l'inverse, le structuralisme considère les êtres vivants comme étant nécessaires. Leur structure générale est inscrite dans les lois de la nature. A l'instar des cristaux de neige qui possèdent toujours six branches quelques soient les conditions de leur formation, les grands types d'êtres vivants sont en mesure de réapparaître encore et partout là où les conditions physico-chimiques le permettent.

Cette nouvelle vision de la vie, retrouvant d'anciennes intuitions, nous offre ainsi une troisième voie susceptible de déboucher sur de nouvelles découvertes.

Jean Staune est chargé de cours à l'Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (Suisse). Auteur de Notre existence a-t-elle un sens ? (Presses de la Renaissance, 2007), Au-delà de Darwin (Jacqueline Chambon-Actes Sud, 2009). Il a dirigé les ouvrages collectifs Science et Quête de sens et La Science, l'homme et le monde, ayant rassemblé 35 auteurs dont 11 Prix Nobel.

La science se distingue des autres modes de transmission des connaissances, par une croyance de base : nous croyons que les experts sont faillibles, que les connaissances transmises peuvent contenir toutes sortes de fables et d’erreurs, et qu’il faut prendre la peine de vérifier, par des expériences